Compte-rendu de la rencontre du Pont Freudien, Montréal
Compte-rendu de la rencontre du Pont Freudien avec Patrick MONRIBOT, les 22, 23 et 24 octobre 2010 à Montréal.
Cette trentième rencontre du Pont Freudien fut une grande réussite, même si pourtant, elle s’ouvrit par une conférence au cœur de laquelle se situait le ratage. Patrick Monribot y a en effet parlé de « La vie sexuelle contemporaine ». Le public s’y pressa nombreux pour Montréal : une soixantaine de personnes y assista, parmi lesquelles beaucoup de jeunes. Plusieurs d’entre eux venaient pour la première fois, interpellés par le sujet, et se sont ensuite autorisés à poser quelques questions, notamment sur l’énigme de cette jouissance féminine dont ils faisaient la découverte… du moins sur le plan intellectuel. Patrick Monribot a rappelé que malgré les pratiques qui satisfont volontiers l’espèce humaine, quelque chose du sexe se perd et demeure irreprésentable pour tout sujet. Pour parler de sexualité contemporaine et interroger celle annoncée dans un proche futur par la science, P. Monribot nous a livré un mythe vieux de dix-huit siècles, Psyché et Éros, en forme de cas clinique. Cette vignette nous introduisit ainsi progressivement à la jouissance Autre, dite féminine, par opposition et en supplément à la jouissance phallique. Pour conclure, P. Monribot insista sur ce rapport entre les sexes impossible à écrire même pour la science, ce qui laisse la possibilité de la contingence de la rencontre : celle que l’on n’attend pas et qui requiert notre consentement…
Les séminaires du Champ freudien sur la névrose obsessionnelle ont suivi les samedi 23 et 24 octobre 2010, en présence de 26 participants. Lors des séminaires de lecture et théorique, Patrick Monribot a commenté de façon extrêmement précise et rigoureuse le cas de « L’homme aux rats », tirant les ficelles, d’une part du côté de la logique signifiante de l’obsession (inconscient transférentiel), à partir du travail époustouflant que nous a transmis Freud ; et d’autre part du côté de la jouissance pulsionnelle (inconscient réel), repérant dans le cas chacun des objets en jeu. P. Monribot a démontré la stratégie implacable de l’obsessionnel concernant son désir : pour ne pas détruire l’objet désiré, l’obsessionnel se garde de désirer. À cette fin, il annule le désir de l’Autre qui est le carburant du désir propre du sujet. Le désir est mortifié ou au mieux impossible, tandis que la demande est mortifiante. Le sujet obsédé détruit l’Autre comme désirant mais ce faisant, il le ressuscite comme Autre d’une demande mortifiante qui gonfle son surmoi. P. Monribot termina son exposé sur les incidences de la prise en compte de la jouissance pulsionnelle sur la conduite de la cure. La direction lacanienne de la cure, avec les séances courtes et toutes les formes de coupures, prend en compte cette jouissance pulsionnelle et objecte à la consistance de l’Autre. Cette conduite de la cure est la seule à promouvoir une extraction de l’objet pulsionnel hors du champ de l’Autre : il n’y a pas d’antidote aussi radical contre la pensée obsédante. La cure lacanienne est taillée sur mesure pour l’obsessionnel. Patrick Monribot, répondant à une question de l’auditoire, nous révéla un point de sa cure où l’opération d’extraction de l’objet fut à l’œuvre. Exemple très éclairant sur le plan clinique pour repérer une sortie possible, non pas seulement d’une psychanalyse, mais aussi d’une logique obsédante.
Le séminaire clinique, quant à lui, permit à deux cliniciens montréalais, Maxime-Olivier Moutier et Karen Harutyunyan, de présenter deux cas, suivis des commentaires de P. Monribot. Les cas ne se sont pas avérés être des cas de névroses obsessionnelles probants, mais ont donné matière à discuter la question du diagnostic différentiel, question quotidienne dans la clinique contemporaine. Patrick Monribot, en outre, a consacré, à un petit groupe resserré, un temps privilégié destiné à l’étude des formules de la sexuation. Ce commentaire, d’une rigueur et d’une qualité très précieuses, permit aux huit personnes présentes de pousser plus loin leur compréhension de l’abord lacanien de la jouissance féminine et de la logique de ces formules. Voilà une trentième rencontre du Pont Freudien à Montréal qui fut très enseignante pour nous qui sommes isolés sur le plan psychanalytique au regard de la doxa nord-américaine, et géographiquement, éloignés de l’épicentre psychanalytique. Les échos reçus dans l’après-coup de cette rencontre montrent déjà les effets qu’elle a produits. Elle fut un événement dans la série-automaton de nos rencontres. Bernard Seynhaeve poursuivra en mars 2011 le cycle d’étude de la névrose obsessionnelle, abordant la question des quatre concepts (inconscient, répétition, transfert et pulsion) chez l’obsessionnel à partir de sa cure. Nous l’attendons et préparons cette prochaine rencontre avec enthousiasme.
Anne Béraud, Montréal, le 11 novembre 2010. Nouvelle École Lacanienne de Psychanalyse — New Lacanian School of Psychoanalysis
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Association Mondiale de Psychanalyse – World Association of Psychoanalysis