Messager 449 – 2011/2012
VERS TEL AVIV 44 / TOWARDS TEL AVIV 44
Xe Congrès NLS 16-17 juin 2012 / 10th NLS Congress 16-17 June 2012
15 mai 2012
15 May 2012
VERS TEL AVIV 44 – Textes 6 – Claudia Iddan
Nous diffusons ici le texte de l’exposé récent de Claudia Iddan à Genève, lors du séminaire de préparation au Congrès organisé par l’ASREEP-NLS, le 12 mai 2012. Ce séminaire a été animé cette année alternativement par Luc Vander Vennet et Claudia Iddan. La première intervention de Claudia a été diffusée par NLS-Messager 380 (Vers Tel Aviv 34) et portait sur la Conférence à Genève sur le symptôme. Cette fois, elle commente la conférence sur le symptôme à Columbia University aux Etats-Unis en 1975; elle y associe d’autres textes de la même période mais revient aussi à quelques passages frappants des premiers Séminaires. Cette étude rigoureuse des textes de Lacan nous apporte un éclairage précieux sur ce que nous avons tenté de cerner tout au long de cette année, à partir du texte « Lire un symptôme » de J.-A. Miller: le symptôme comme Janus vérité-réel, le parlêtre et l’événement de corps, l’interprétation qui touche le cœur réel du symptôme, la lettre et l’existence, et bien d’autres points encore.
Anne Lysy
TOWARDS TEL AVIV 44 – Texts 6 – Claudia Iddan
We are circulating the text of the recent paper by Claudia Iddan in Geneva, for the NLS Congress preparatory seminar organised by ASREEP-NLS on 12 May 2012. This year, this seminar was alternately moderated by Luc Vander Vennet and Claudia Iddan. The first intervention by Claudia was circulated on NLS-Messager 380 (Towards Tel Aviv 34) and dealt with Lacan’s Geneva Conference on the Symptom. This time Claudia comments on the Conference on the Symptom at Columbia University in the United States in 1975; She groups it with other texts of the same period but also returns to certain startling passages from Lacan’s first Seminars. This rigorous study of Lacan’s texts brings us a valuable clarification on what we tried to discern all along this year, starting from the text ‘Reading a Symptom’ by J-A Miller: the symptom as Janus of truth and real, the speaking-being and the body event, interpretation that touches the heart of the real of the symptom, the letter and existence, and many more points.
Anne Lysy
Le discours analytique : une partie entre symptôme et sinthome
Claudia Iddan
« Le symptôme, quel qu’il soit, n’est pas proprement résolu quand l’analyse n’est pas pratiquée avec cette mise au premier plan de l’action de l’analyste de savoir où doit porter son intervention, où est essentiellement l’intervention analytique, le point du sujet-si je puis dire- qu’il doit viser ». C’est dans le séminaire II de Lacan du [8-12-54] que celui-ci énonce l’orientation concernant la relation étroite qui existe entre le symptôme du sujet et le « point du sujet » que l’intervention analytique « doit viser » afin de trouver une solution finale au symptôme. Lacan fait allusion à une intervention qui vise le Je du parlêtre, der Kern unseres Wesen, on pourrait même dire qu’elle vise le noyau du symptôme. Si l’on tient compte qu’un symptôme, malgré le désarroi qu’il cause, est une tentative de nouer le point central sur lequel porte le désaccord entre le corps et l’inconscient, l’intervention analytique viendrait donc à viser un nouveau nouement. Un accord corps-inconscient est proposé comme solution-invention à ce que la psychanalyse révèle, que « le fin de la vérité, la vérité vraie, est qu’entre homme et femme ça ne marche pas » tel que Lacan l’énonce [Yale, p.16]. C’est le symptôme lui seul qui fait marcher d’une certaine manière la relation entre les sexes par la voie de l’inconscient. Tout discours se base sur cette vérité « vraie » que l’on ne veut pas savoir: qu’il n’y a pas de rapport sexuel et que c’est au moyen du symptôme, en tant que partie intégrante de l’inconscient, que se créée la fiction d’un rapport auquel « on y croit ». Dans le séminaire Le Sinthome Lacan dit que le symptôme « est fait de la carence propre au rapport sexuel », [p70]: même si le symptôme est fait de la carence propre au rapport sexuel, il énonce une vérité menteuse du fait qu’il met justement en relief une jouissance qu’on ne peut pas négativiser. Il souligne ainsi des dimensions différentes qu’on développera par la suite.
Comment cette relation entre symptôme et intervention analytique fonctionne?
À ce propos je me référerai cette fois-ci à plusieurs points extraits des conférences données par Lacan aux États-Unis en 1975, et en particulier à celle intitulée: « Le Symptôme », conférence qui avait été donnée à Columbia University (in Scilicet 6/7, Seuil).
Cette conférence se focalise, à mon avis, sur la relation entre le discours analytique et le symptôme, autour de l’axe que Lacan avait déjà établi dans « Fonction et champ de la parole et du langage… », axe qui détermine que « l’inconscient est structuré comme un langage ». Le texte met en relief la place de l’analysant et celle de l’analyste dans le discours, ou en d’autres mots il met en relief la place prédominante que le transfert remplit par rapport au symptôme. Nous allons y suivre le fil conducteur pour cerner les deux points en jeu par rapport au symptôme: le discours-inconscient et le corps.
Comme dans beaucoup de ses conférences ou cours, le discours de Lacan est un témoignage direct de son enseignement sur l’intervention analytique. Dans son enseignement Lacan avait coutume d’affirmer qu’il parlait en tant qu’analysant, on s’aperçoit cependant qu’il donnait en même temps une orientation claire sur la direction de l’opération analytique. Par exemple toutes les équivoques ou les néologismes qu’il a inventés constituent une démonstration de la place qu’une interprétation peut avoir dans l’analyse.
Le texte commence par la présentation d’une équivoque; celle de la dit-mension, ou dimension du dit que Lacan définit dans cette conférence comme l’endroit où repose un dit. En effet, on pourrait se demander où reposent les dits, ils reposent sur trois endroits: le réel, le symbolique et l’imaginaire. Dans le séminaire « Sinthome » [p.144] Lacan ajoutera que la mension, la mension du dit « permet de prolonger mension en mensionge, ce qui indique que le dit n’est pas du tout forcément vrai. » En mettant en valeur la place du dire, on met en évidence la place de la vérité dans tout discours et plus particulièrement dans le discours analytique, en soulignant le fait que dans le dire de la vérité il n’y a que mi-dire, parce que la vérité on la dit seulement en partie. Mais c’est tout même le nouement de ces trois dit-mensions qui donne sa consistance au parlêtre, qui, dirais-je, devient corps, se corporéifie. De ce fait un deuxième axe apparait dans le discours, celui du corps sur lequel vient se greffer la structure de l’inconscient. C’est le corps qui sert du support au discours ou tel que Lacan l’exprime: « le sujet de l’inconscient embraye sur le corps » [Télévision-VI]. C’est à dire que les formations de l’inconscient trouvent leur moteur dans le corps. Ces deux axes mettent en relief le fait que c’est au moyen de l’opération analytique que doit s’établir la relation entre l’inconscient et le corps, que l’objectif de celle-ci est de faire ressortir l’événement de corps, ce qui est arrivé au corps à la suite de l’impact de la langue et de ses effets. Mais pourquoi devons-nous établir cette relation ? Parce que tout être parlant, comme Lacan l’exprime [RSI, 14-1-75], est toujours mal placé entre deux et trois dimensions – et l’analyse viendrait donc à resituer le parlêtre par rapport au réel, à le placer dans une meilleure position jusqu’au point de s’identifier avec son symptôme devenu sinthome à la fin du parcours analytique.
Dans le discours analytique, la présence des corps est absolument indispensable afin de pouvoir dévoiler la relation existante entre l’inconscient et la pulsion incarnée dans un symptôme. Nous nous référons ici à la rencontre corps à corps d’un analysant avec son analyste. « L’analyse est de cet ordre » [Scilicet 6/7, p. 43]- dit Lacan, en se référant au fait qu’un discours est en rapport avec un lien social qui exige aussi la présence corporelle.
Nous trouvons encore une fois soulignée la distinction, « la montagne » existante, entre le dire et l’écrit dans le langage, distinction qui implique en même temps une différence d’un autre ordre, dans l’ordre du dire de la vérité, entre une vérité généralisée, universelle, qui regroupe l’ensemble de tous les parlêtres même si parfois elle prend une forme particulière, et celle particularisée, à savoir une vérité singulière propre à chaque sujet qui le transforme en Un déconnecté de l’Autre. En d’autres mots nous avons d’une part « le dire de tous », comme par exemple dans les expressions » c’est pareil chez tout le monde « , ou « tous réagissent comme ça, n’est ce pas? », c’est à dire des dits qui créent un ensemble, pourrait-on dire, et nous situent du côté du citoyen [p.44], tel que Lacan l’appelle dans le texte, le côté d’égalité de droits de l’être humain. Et d’autre part, nous avons le dire qui par la suite se fait « rivière de retour à ce par quoi on tient à sa famille, c’est à dire par l’enfance », rivière qui l’achemine vers une particularité au sein de l’ensemble, à une mère et à un père bien définis grâce auxquels il va finalement pouvoir aboutir à une singularité dans son parler.
C’est à cet endroit précis que la figure du père est introduite dans la conférence [p.45]: « Le père, c’est une fonction qui se réfère au réel, et ce n’est pas forcément le vrai du réel. Ça n’empêche pas que le réel du père, c’est absolument fondamental dans l’analyse. Le mode d’existence du père tient au réel. C’est le seul cas où le réel est plus fort que le vrai. Disons que le réel, lui aussi, peut être mythique. Il n’empêche pas que, pour la structure, c’est aussi important que tout dire vrai. Dans cette direction est le réel […] C’est fort inquiétant qu’il y ait un réel qui soit mythique, et c’est bien pour ça que Freud a maintenu si fortement dans sa doctrine la fonction du père. »
C’est en parlant de la particularité, que surgit la fonction du père et plus précisément son mode d’existence relié au réel. Un mode d’existence de la fonction du père qui d’après Lacan, peut être mythique. À propos de mythique Lacan rappelle ici la fonction du père chez Freud, et cela nous amène, bien sûr, au mythe du père de l’horde, c’est à dire à la figure de celui qui jouit de toutes les femmes ou en d’autres mots à un mode de jouissance qui échappe à la castration. Et c’est là précisément que se trouve la place du symptôme, la place de l’existence d’une jouissance qui en même temps résiste à la castration et reste opaque, hors sens, mais qui néanmoins fait nœud.
En ce qui concerne ce point, il faut aussi ajouter que vers la fin de l’élaboration du concept de la pulsion, Freud attribue aux pulsions le statut d’être mythique, à savoir de ce qui est susceptible d’éclairer un impossible à formuler.
Le discours-inconscient
En faisant allusion au Séminaire 1 sur les Écrits techniques de Freud, nous remarquons qu’au principe fondamental qui établit que « L’inconscient est structuré comme un langage » viennent s’ajouter, à mon avis, deux points: celui du transfert et celui du concept de la « parole pleine » par rapport au dire de la vérité. Mais il faudrait souligner que ce que Lacan présente dans le séminaire 1 comme le dire plein de la vérité dans l’analyse est en fait représenté ici par un par-dit, dit Lacan, en soulignant le fait que l’analyse est une partie à deux effectuée par le dit, un dire qui à des moments donnés est dur à obtenir, et qui résulte, toujours, en un mi-dire. Quel est donc le mode de fonctionnement de l’analyse? C’est un discours entre « quelqu’un qui parle […] que sa parlote avait de l’importance […] qui parle sans le moindre souci de se contredire et […] quelqu’un qui ne parle pas […] et quand il parle, [parce que quand même il a des choses à dire, comme Lacan remarque] il est supposé dire la vérité, mais pas n’importe laquelle, la vérité qu’il faut que l’analysant entende […] pourquoi? pour ce qu’il attend, à savoir d’être libéré du symptôme » [p. 45-46]. On trouve ici la même idée déjà présentée dans le séminaire II, et cette fois -ci le point à viser au moyen de l’intervention analytique est un point de vérité, dirais-je, de vérité vraie.
Tout cela permet de déterminer « que le symptôme et cette sorte d’intervention de l’analyste […] sont du même ordre ». Et quel est en fait cet ordre? Je dirais que c’est l’ordre du symptôme, car à partir du moment où la présence de l’analyste devient partie intégrante de l’inconscient de l’analysant, « est une manifestation de l’inconscient » [Sem. XI ], le transfert met en scène la réalité de l’inconscient, c’est à dire la sexualité. Mais comment peut-on s’apercevoir de l’ordre du symptôme qui est propre à la place de chacun d’entre eux, analysant-analyste?
Nous avons d’un côté, l’angle de l’analysant [p.46]: « Le symptôme, lui dit quelque chose. Il dit, il est une autre forme de vrai… », on pourrait dire une forme de vrai, de vérité menteuse qui enveloppe le noyau de la satisfaction. La citation continue et dit: « le symptôme ça résiste, ce n’est pas quelque chose qui s’en va tout seul… ». C’est précisément ce noyau de satisfaction, ce point de fixation ou peut être de vérité vraie, qui résiste à passer par la parole et cela exige une intervention – de la part de l’analyste mais peut être aussi du côté de l’analysant – qui rime pourrait-on dire avec la voie de formation de ce symptôme. Nous avons de l’autre côté, l’angle de l’analyste, il « ne peut pas se concevoir autrement que comme un sinthome » [Sinthome, p. 135]. C’est à dire, comme celui qui est en mesure d’apporter une réponse, ajoute Lacan, « à la réalité de l’inconscient ».[Ibid, p. 139] En d’autres mots, c’est l’intervention de l’analyste qui répond à la réalité sexuelle, au réel dans l’inconscient, à ce point du Je en jeu. Lacan l’appelle dans Le Sinthome « l’osbjet » [p.145 ], un os dur incarné par un point de fixation de la jouissance, par une lettre.
Nous avons donc une partie entre une demande et une réponse du même ordre. D’une part, nous avons un symptôme auquel le parlêtre croit, croit qu’il veut dire quelque chose, quelque chose qu’il sait, sans savoir qu’il sait et de ce fait il s’adresse à un analyste pour être libéré de ce qu’il n’arrive pas à gérer.
On sait par ailleurs que l’analyste a pour fonction de « contrer le réel »- cette idée est présentée par Lacan dans sa conférence La Troisième – bien entendu ceci n’implique pas qu’on maintienne un duel ni qu’on libère le parlêtre du symptôme, il s’agit tout simplement d’intervenir afin de cerner le réel en jeu dans le symptôme pour rendre possible finalement l’articulation d’un reste de jouissance et la création d’un sens au moyen d’une nomination: nommer une espèce d’identité par rapport à la jouissance.
La fonction du père consiste à donner un nom, cette attribution est conforme au parcours effectué par Lacan tel que nous pouvons l’observer dans son dernier enseignement sur le Nom du Père. En effet, dans celui-ci, il passe de l’unité à la multiplicité des Noms du Père et au Père qui nomme. Et c’est sans doute la raison pour laquelle dans cette conférence la fonction du père surgit au moment où il se focalise sur la particularité du parlêtre. Ceci s’explique dans le contexte de la fonction qu’il assume à savoir celle de nommer l’existence d’une jouissance opaque, déconnectée de l’inconscient.
La distinction entre le dire et l’écrit déjà soulignée auparavant est révélée au début de cette conférence par le biais de la parlote générale opposée au dire singulier ou familial, et elle est suivie de plusieurs remarques. Tout d’abord cette distinction introduit l’écart entre ce qui se dit ou ce que l’on veut dire ou ce qui nous tient à cœur et ce qui résiste à être dit ou qui ne veut pas être dit. Cette distinction nous amène à établir la différence qui existe entre le langage et lalangue – en un seul mot – ou entre le signifiant et la lettre. Lalangue, à laquelle Lacan se réfère ici est appelée un langage et pas le langage [p.47], c’est la langue maternelle qu’on reçoit, que l’enfant reçoit et dont Lacan souligne qu’elle ne s’apprend pas. A l’instar de la grammaire et des figures rhétoriques instillées par la façon de parler de ses parents et qui porte en elle la marque de leur désir, la marque de ce qui l’identifie comme étant le sujet désiré ou pas, par ses parents. Rappelons ici l’idée présentée dans la conférence à Genève sur le symptôme qui fait ressortir que c’est grâce à la façon dont lalangue est parlée et aussi entendue que s’effectue la prise de l’inconscient et que c’est précisément grâce à ces détritus ,ou motérialismes tels que Lacan les appelle, laissés par l’eau du langage que le parlêtre pourra faire « la coalescence de la réalité sexuelle et le langage ».
Dans cette conférence un autre point est présenté, celui de l’opposition entre une conception du monde et un style.
Le fait d’avoir une conception du monde n’impliquerait pas, selon Lacan, qu’on ait un monde intérieur et un monde extérieur dont l’un serait le reflet de l’autre. Au contraire un style est inhérent à une forme de discours, à une façon de concevoir le lien social en général et la communication aussi. Dans la conférence La Troisième, on trouve, à propos de la relation au monde, une idée qui clarifie davantage ce qu’est le style quand il dit que dans le monde il n’y a rien en dehors d’un objet a, d’un reste qui ex-siste au corps, en dehors du corps. Cette idée met en valeur le fait que l’homme corpo-réifie le monde, le fait chose à l’image de son corps et de cette façon le style devient la relation d’un parlêtre à son monde en tant qu’incarnation de son objet-cause, bien évidemment avec tout ce que cela implique par rapport au lien social.
Si l’on revient à la notion d’écrit, Lacan mentionne ses Écrits dans cette conférence bien que de façon indirecte, quand il fait allusion à son propre parcours, à la transition du dit à l’écrit. Par la suite il se réfère aussi à ses mathèmes discursifs pour terminer avec les nœuds: en d’autres mots, il met en évidence les deux types d’écriture mentionnés auparavant. Et ce sont précisément ces deux modes de l’écrit que J.A.Miller fait ressortir dans son cours « Pièces détachées », du 12-1-05, l’un c’est le mode de l’écrit qui parle, comme notation de ce qui est dit, du discours, l’autre, c’est l’écrit comme marque, comme celui qui ne veut rien dire. Le premier est ce qui peut se lire et le deuxième ce qui n’est pas- à- lire ou à relier au signifié. Ces deux modes d’écriture mettent en valeur la dichotomie entre le signifiant et la lettre qui confère au sinthome sa place adéquate. En effet dans l’analyse, l’inconscient est un langage qui devient discours, qui trouve un ordre et qui permet de lire ce qui est écrit dans le symptôme qu’on traite, celui du désarroi. Par contre, le sinthome en tant que reste de l’opération analytique, est en rapport avec une écriture qui n’invite plus à l’interprétation, il est déconnecté de l’inconscient, détaché du lien qui le relie au désir de l’Autre. Cependant le sinthome invite à prendre acte, à constater l’existence de la jouissance liée à l’Un, au trait du corps dans le signifiant et à transformer celui-ci en outil. En fin d’analyse il peut y avoir un autre type de lecture, qui n’est pas basé sur le sens mais sur le passage à l’acte par rapport au sinthome.
C’est la distinction entre le langage et lalangue qui fait ressortir la différence entre le signifiant et la lettre. C’est le concept de parlêtre qui vient se substituer à celui de l’inconscient en raison de sa relation au corps, en mettant ainsi l’accent sur la jouissance.
Le symptôme et les traces sur le corps
Le mot parlêtre est une équivoque basée d’une part sur la parlote et sur le fait que « c’est du langage qu’on tient cette folie qu’il y a de l’être », dit Lacan [p.49]. La primauté du parler est ainsi soulignée avec ce terme et cette primauté soulève donc la question sur le lieu du corps par rapport au parlêtre.
L’être prend consistance au moyen de cette folie de la croyance de l’homme « qu’il y a de l’être ». En effet c’est à partir du langage, de l’usage même du verbe être et du fait même de parler que l’être fait le lien entre l’image de son propre corps qui le captive et les mots, en imaginant ainsi qu’il pense. « La pensée est en fin de compte un engluement…. c’est un engluement… de ce que j’appelle l’imaginaire » [Genève, p.7]. Dans la conférence sur le symptôme à Genève, Lacan affirme que si l’homme n’avait pas de corps, non seulement il ne serait pas capable de penser puisque la plus grande partie de sa pensée s’y trouve enracinée, mais il ne serait pas non plus capté par l’image de son corps qu’il verse sur son entourage, son monde. La pensée s’enracine donc dans la capture de l’image du propre corps et l’homme, pourrait-on dire, rêve d’être ce qu’il perçoit. C’est une manière de donner consistance à un corps, à une forme parlée sous la forme de la pensée inconsciente. Ce type de consistance est à mettre en rapport avec la dimension du signifiant et du semblant, de l’enveloppe formelle du symptôme.
L’autre façon de donner consistance au corps est celle qui est en rapport avec la matérialité du langage basée sur les marques « laissées par une certaine façon d’avoir rapport à un savoir, qui constitue la substance fondamentale de ce qu’il en est de l’inconscient » [p.50]. Il s’agit d’un savoir qui constitue la substance fondamentale d’une jouissance du corps pulsionnel qui est condensé dans les marques de l’Un, les marques de ce signifiant-lettre, tel que Lacan l’appelle. Et ce sont ces marques qui donnent de la consistance au corps pulsionnel, au savoir acéphale. Du côté de l’être, nous avons donc un corps parlé sous la forme d’une pensée et de l’autre côté, celui de la jouissance, nous avons un corps fixé par les marques de l’Un, les marques provenant de la relation entre l’inconscient et le corps. Mais il arrive tout même que le parlêtre traite son corps comme une propriété, « comme un meuble qui se laisse trimbaler » [p 49]. L’idée de propriété donne l’illusion d’avoir un pouvoir sur lui, d’être son maitre, mais aussi met en évidence le fait qu’il faut se l’approprier, même si « c’est évident que le fait qu’il consiste en un corps, est-ce qu’il y a de plus certain ». À quel moment exactement le parlêtre prend conscience qu’il consiste en un corps? A partir du moment où il rencontre le monde extérieur, un monde corpo-réifié par lui même, fait chose à l’image de son corps, c’est alors qu’il trouve « des choses qui ne se déplacent pas facilement, qui se résistent » [p 49]. Autrement dit le parlêtre se rend compte qu’il consiste en un corps quand il s’écrase, se fait « une bosse » face à l’os de son propre symptôme, face à sa réalité sexuelle.
Les marques laissées par l’impact de la langue sur le corps, c’est à dire les lettres, constituent le matériel qui est prêt à l’équivoque et qui peut faire la coalescence entre la réalité sexuelle et le langage. Lacan énonce dans cette conférence que ce sont les signifiants mêmes qui véhiculent le savoir qui constitue le réel de l’inconscient et pas les mots ni l’instinct.
« L’interprétation doit toujours – chez l’analyste – tenir compte de ceci que, dans ce qui est dit, il y a le sonore, et que ce sonore doit consonner avec ce qu’il en est de l’inconscient » [p. 50]. L’interprétation, ou le dire de la vérité du côté de l’analyste, consiste précisément à souligner la rencontre avec la jouissance par le biais de l’équivoque, de la rencontre entre le langage et la réalité sexuelle, c’est à dire la rencontre avec la jouissance. Au moyen de l’équivoque Lacan met sur le même plan l’homophonie, la grammaire et la logique de ce qui est dit. Ainsi la place de l’analyste et son intervention viennent apporter une réponse à ce qui est dit en introduisant la présence du vide du corps pulsionnel ou paradoxalement de l’osbjet.
Le cheminement vers le point visé par l’intervention de l’analyste, celui de la vérité vraie du sinthome, permet d’ouvrir la possibilité de nommer ce reste de jouissance, de trouver un savoir-y faire ou de le manier, et surtout de se nouer « au corps, c’est à dire à l’imaginaire, de se nouer aussi au réel, et, comme tiers à l’inconscient, [ce qui fait ] que le symptôme a ses limites » [Le Sinthome, p.169].
L’intervention de l’analyste a pour but de limiter le symptôme, de le réduire à l’événement de corps, au jouir premier, ce qui implique également que l’analysant de son côté lâche un bout de jouissance et invente ou ajoute, quelque chose au réel qui puisse produire un sens. Tandis que chez l’analyste cette limitation entraine par conséquent la chute de sa place en tant que sinthome ou osbjet, à partir du moment où le parlêtre réussit à opérer avec son sinthome, à se situer différemment par rapport au réel.
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