La Journée de l’Institut de l’enfant, samedi 19 mars 2011 – Palais des Congrès d’Issy-les-Moulineaux N°9 [email protected] http://www.jie2011.blogspot.com Sommaire : On lira ici avec profit l’entretien de La Lettre mensuelle avec trois membres de la Commission d’initiative, Judith Miller, Jean-Robert Rabanel et Alexandre Stevens, ainsi que l’annonce de la (re)diffusion d’un fort instructif documentaire ,L’enfance sous contrôle, accompagné d’un témoignage de soutien au petit Hans et de celui, par Gaël, de l’usage de sa singulière agoraphobie. Même pas peur !!
La Journée a lieu au Palais des Congrès d’Issy-les-Moulineaux. Situé tout près du terminus Mairie d’Issy de la ligne 12, il est d’accès aisé. Une indication : de Montparnasse, comptez 20mn en métro. L’accueil se fera à partir de 8h30 et les travaux commenceront à 9h30 précises, pour se clore à 19h. Pour la pause déjeuner — de 13h à 14h30 — il est judicieux de réserver à l’avance dans les restaurants qui sont indiqués sur le blog : http://www.jie2011.blogspot.com Des questions ? Une seuleadresse : [email protected]
Judith Miller, Jean-Robert Rabanel et Alexandre Stevens, membres de la Commission d’initiative de la Journée d’étude de l’Institut de l’Enfant répondent aux questions de La Lettre mensuelle (entretien paru dans LM n° 296) Cette journée va être historique : réunion des différentes structures consacrées à l’enfant dans l’Institut. Quelles sont les difficultés de cette entreprise et qu’attendre de cette nouveauté institutionnelle ? La proposition de Jacques-Alain Miller de créer un Institut de l’enfant date de décembre 2009. Elle a été accueillie avec enthousiasme, d’autant qu’elle répondait au souci de ce moment : rétablir l’énonciation et tempérer les effets de colle qui résultent de la dite « identification groupale ». Le temps pour comprendre est venu, dans la bonne humeur et la convivialité : écoute des uns par les autres, circulation des réflexions, propositions ébauchées. Ce temps demandait de la mesure et un peu d’invention. Dans les trois instances, Cereda, Cien et RI3, la conviction de la puissance qu’aura un Institut les réunissant continue d’être élaborée, la Journée du 19 mars la confirmera ou pas… Chacune de ces instances y garde sa spécificité. Pour aller vite, je dirai ici que le Cereda traite des enfants dans le travail sous transfert que leur permet un analyste, que le RI3 affine les leçons de la clinique des institutions d’orientation lacanienne et que le Cien assure l’éducation freudienne de ceux que leurs diverses professions conduisent à s’occuper d’enfants. Que cette Journée de l’Institut de l’enfant ait lieu est une bonne nouvelle. Déjà, elle n’a pas mis au travail les seuls participants de ces trois instances, elle convoque aussi l’intérêt d’autres collègues. Les premières anxiétés – il ne faut pas rater cette « première » – se sont dissipées au fur et à mesure que l’actualité du thème « Les peurs de l’enfant » se confirmait. Le remarquable travail bibliographique accompli démontre que nous avons des outils et matière pour cerner les peurs de l’enfant contemporain. Les propositions d’intervention ont non seulement fusé, ce qui témoigne de la fécondité de ce thème. Il fut dur, comme toujours, de choisir quels textes retenir et quels ne pas. Nous avons bon espoir que certains seront accueillis dans la revue de l’Institut, « l’IE », comme l’appellent ses partisans les plus décidés. Pourquoi ce choix de thème ? Est-ce un motif symptomatique fréquent dans les consultations pour enfant? Doit-on mettre en continuité la peur et l’angoisse ou accentuer la discontinuité entre les deux? « Peurs d’enfants » est un thème qui concerne aisément les préoccupations de tous les cliniciens de notre champ, qu’il s’agisse de phobies pour lesquelles on vient consulter un psychanalyste ou d’angoisse d’envahissement par l’Autre comme elle se présente dans la pratique avec les enfants psychotiques en institution. Mais c’est aussi une question pour ceux qui travaillent avec les enseignants et les travailleurs du champ social pour qui la crainte de l’école est une difficulté souvent rencontrée quand ce n’est pas aussi la peur que cause l’enfant. Est-ce un motif symptomatique fréquent dans les consultations pour enfant? Mais oui ! Cela dit il ne s’agit pas toujours de la même peur. Chez les jeunes enfants c’est bien souvent l’expression d’une peur qui se présente comme premier symptôme exprimable : terreur nocturne, cauchemar, trait phobique ou phobie franchement organisée. Mais quand un enfant entend des voix, il arrive aussi qu’il exprime la peur qu’elles lui causent. Ou encore, comme me le disait récemment un jeune « un regard ça peut toujours être méchant, alors j’ai peur quand il y a trop de monde qui pourrait me regarder ». La peur est ainsi un phénomène trans-structural qui recouvre toute une série de problèmes différents. Cependant dans tous les cas, il est utile que le sujet élabore cette peur pour qu’il puisse selon le cas s’en détacher ou au contraire s’en construire un petit symptôme qui lui donne un repérage utile. Doit-on mettre en continuité la peur et l’angoisse ou accentuer la discontinuité entre les deux? En un sens bien entendu c’est la continuité entre les deux qui domine. Quand un sujet dit : « j’ai peur de … » ou « je suis angoissé », il n’est pas évident que cela marque une différence. Encore qu’on entendra plus souvent les enfants dire : « j’ai peur » et les adultes : « je suis angoissé ». Mais lorsqu’on cherche à construire la situation clinique il reste important de distinguer avec Lacan la peur de l’étranger inconnu et l’angoisse devant l’étrangeté de l’intime. L’enfant dit facilement sa peur. L’adulte, moins. Celui qui a peur c’est l’enfant dans l’adulte ? L’enfant dans l’adulte, me semble-t-il, donne un peu trop l’idée de l’imaginaire, alors que ce que nous souhaitons souligner avec « Peurs d’enfants », c’est le versant de réel. Évidemment l’enfant dans l’adulte pourrait être la version poétique de l’infantile freudien. L’enfant dit facilement sa peur. Certes encore qu’il soit difficile de généraliser. L’absence de refoulement et le fait de l’amnésie infantile lui rend l’expression de ses peurs plus urgente, plus immédiate, impérieuse comme une souffrance. L’adulte, moins. C’est qu’il lui a fallu effectuer un travail. C’est qu’il lui a fallu consentir à une perte pour arriver à lasymptomatisation de ses peurs. La fonction différente que les peurs ont pour l’enfant et pour l’adulte dans l’énergétique freudienne, lève quelque peu du mystère du facile… au moins, en particulier dans le rapport à l’angoisse face au surmoi. Celui qui a peur c’est l’enfant dans l’adulte ? C’est différencier peur et angoisse et faire du surmoi et de la castration un critérium. C’est oublier que, chez le parlêtre, c’est la relation à la langue qui est le principe de l’événement fondamental, traceur d’affect, comme le rappelle Jacques-Alain Miller in « Biologie lacanienne et événement de corps », La Cause freudienne, n°44, p.47. Comme évènement de corps, les peurs d’enfants, peuvent prendre valeur de défense. Il est des sujets pour lesquels la prise de parole représente l’avènement d’un dire qui n’en passe pas par la castration. Un dire qui confronte alors à la méchanceté de l’Autre sans médiation, sans le secours d’aucun discours établi. Cette peur est salutaire, elle a valeur de défense du sujet, pour partie seulement car sur le versant du surmoi, le sujet reste exposé au danger que lui fait courir sa dépendance de la parole de l’Autre. Ce que Lacan souligne dans sa conférence de 1967, au Cercle d’Etudes psychiatriques à l’adresse des psychiatres, c’est ce à quoi ils sont concernés, dans leur relation au fou, à savoir l’angoisse, ce dont l’analyse ne dispense pas, dit-il. Le corps des psychiatres n’a pas su, des effets de ségrégation, délivrer le sens véritable, faute de n’avoir pas fait du fou « le point d’interrogation, dit il, au niveau de ce qu’il en est d’un certain rapport du sujet à cet objet étranger, parasitique, qui est la voix en tant que la voix est support du signifiant.» Précisément les textes que nous avons choisis, parmi ceux, très nombreux, qui ont été adressés, pour la Journée du 19 mars, mettent au premier plan les diverses fonctions de la peur et la place éminente que la voix vient y occuper.
L’enfance sous contrôle Documentaire de Marie- Pierre Jaury Diffusion le 21 mars 2011, à 22h30, sur http://www.publicsenat.fr Rediffusion le : Le samedi 26 mars 2011 à 22h00 Le dimanche 27 mars 2011 à 18h00 Le lundi 28 mars 2011 à 17h00 Durée : 52 minutes Aujourd’hui, les troubles du comportement de l’enfant et de l’adolescent sont devenus une préoccupation centrale de nos sociétés. Certaines études scientifiques, relayées par le discours politique, affirment que l’on peut y voir les prémices d’un parcours délinquant. Le film est une investigation – sereinement mais fermement menée – sur les dépistages de plus en plus précoces (pourquoi pas sur le foetus), de l’éventuelle dangerosité de nos enfants. Conduits confiants vers des modalités évaluatives dont ils ne peuvent soupçonner les intentions classificatrices, nos enfants nous paraissent bien manipulables. Découvrez le logiciel «Dominique» ! Tourné au Canada, aux États-Unis et en Europe, l’Enfance sous contrôle nous montre les contributions pharmaceutiques, politiques et scientifiques ou théoriques à ces évaluations. Entrecoupée de très belles images des «400 Coups» de François Truffaut (pour nous rappeler que toute enfance est heureusement indisciplinée), l’enquête nous conduit à travers le dédale des nouveaux instruments de « lasociété sous surveillance ».
« Chevaux de bataille » (Petit Hans versus comportementalistes) – par Isabelle Fragiacomo Le rapport de l’INSERM sur les psychothérapies (2004)1 répertoriait les phobies de l’enfant parmi les « troubles anxieux ». D’après ce rapport, « les preuves de l’efficacité des TCC dans les troubles anxieux de l’enfant et de l’adolescent sont encore limitées ». Pourtant en se basant sur l’étude de Ollendick et King (1998)2, le rapport met en avant deux techniques de TCC « probablement efficaces » (l’apprentissage des verbal coping skills et la technique du modèle in vivo) et affirme qu’il existe « une preuve d’efficacité » pour deux autres techniques de TCC : le « modeling de participation », où l’enfant est incité à s’engager dans les activités anxiogènes avec un modèle dont les actions servent de médiateur au cours de l’exposition et la technique de « gestion des contingences de renforcement », fondée sur les principes du conditionnement opérant (reinforced practice). Le Service de la santé mentale pour enfants de la naissance à l’âge de six ans de la Province d’Ontario au Canada tire les conséquences de cette étude dans son « Analyse bibliographique et Guide pratique » (2002)3, et préconise ce qu’il appelle des « Pratiques prometteuses en santé mentale de la petite enfance ». On peut y lire que « chez les plus jeunes enfants, le trouble anxieux le plus fréquent est l’anxiété de la séparation, suivie de la phobie sociale et ensuite des simples phobies (peur d’un animal ou d’un objet précis). En plus du recours à la TCC, les traitements particuliers du comportement, surtout le modelage des participants et la pratique renforcée, ont donné des résultats concluants dans les cas de phobies ». Par chance pour les enfants suivis par ce Service de santé mentale en Ontario, « aucun des médicaments étudiés dans le traitement des troubles anxieux des enfants n’a fourni de preuve concluante de son efficacité ou de l’absence de risque », contrairement aux THADA (troubles d’hyperactivité avec déficit de l’attention), TC (trouble des conduites), et à la dépression. En France, la conférence de consensus de l’ANAES intitulée « les troubles dépressifs chez l’enfant, reconnaître, soigner, prévenir, devenir » (1995)4 limite également l’usage du traitement chimiothérapique. Mais lorsqu’on y lit que « les TCC sont très peu développées chez les enfants de moins de 12 ans », on mesure qu’elle date d’il y a plus de 15 ans… À l’heure du déclin de la fonction paternelle, on peut entendre la montée en force des TCC pour le traitement des « troubles psychiques » des enfants, comme une version terroriste du père. La psychanalyse d’orientation lacanienne, quant à elle, rappelle que le véritable père c’est le langage, à la suite de Lacan qui, dans Le séminaire IV, qualifie le travail de la cure du Petit Hans de « progrès de l’imaginaire au symbolique »5. Les symptômes phobiques des enfants ne sont pas aujourd’hui jugés préoccupants par les autorités de santé qui veulent encadrer strictement les pratiques, contrairement au suicide des adolescents qui a fait l’objet d’un texte de recommandation par l’ANAES6. Il reste encore la possibilité aux enfants de dire quelque chose qui puisse être entendu ! 1 Psychothérapie, trois approches évaluées, Éditions Inserm, ISBN 2-85598-831-4, 568 pages, Février 2004. 2 Annexes au rapport de l’INSERM, p.539. 3 http://www.kidsmentalhealth.ca/documents/PR_0_6_analyse_bibliographique_et_guide_pratique.pdf 4 http://psydoc-fr.broca.inserm.fr/conf&rm/conf/confdepression.html 5 Lacan, J. (1956-57) Le séminaire IV, La relation d’objet, Seuil, Paris, 1994, p.266. 6 http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/suicidecourt.pdf
Une «claustrophobie» – par Julien Lecubin Gaël est un jeune homme accueilli au Courtil qui témoigne de ce qu’il se sent épié par les voisins ou insulté par les passants. Il en déduit le diagnostic de « claustrophobie », qui répond à ce qui quotidiennement le regarde. Nous verrons que cet usage qui nous semble maladroit de ce terme a sa fonction salutaire. «Une mère ça donne la vie» Ce jeune dit être resté «figé comme un glaçon» après le décès de sa mère qui se défenestre sous ses yeux alors qu’il n’a que sept ans. Cet évènement déclencheur restera en effet gravé comme étant « la cause de tout » et notamment de l’envahissement de ses pensées. Lorsqu’il explique qu’« une mère, ça donne la vie », ceci est à entendre dans le réel de ce que la source de vie a laissé place à une rumination morbide. C’est alors que les impératifs du père qui attend de Gaël qu’il « fasse comme tout l’monde » le figent un peu plus par leur caractère intrusif. Ainsi, il abandonne progressivement l’école où il est obligé de couvrir grâce à son mp3 « la voix d’une femme ». Les bonnes intentions de ses professeurs l’accablent, le renvoyant à la position paternelle. « Manque total de motivation » peut-on alors lire sur son bulletin. Englué dans ses pensées, il broie du noir et se met en colère pour une broutille. Il glisse de bouderies en fâcheries sans que rien ne semble pouvoir l’en décaler, hormis sa console de jeux. À l’extérieur se pose un problème de taille car selon lui, sa carrure de plus de deux mètres attire les regards. Alors, il n’a de cesse de trouver ce regard. Et si ce dernier manque à l’appel, il parle fort, se cogne contre les bâtis de porte, sollicitant ainsi ce qui le met à cette place hors norme ou plutôt hors-« comme tout l’monde ». Contrairement à ce que l’on pourrait attendre, chercher un costume à sa taille et à prix raisonnable n’est pas la plus grande difficulté. Ainsi, c’est surtout quand nous le trouvons que cela devient compliqué. En effet, après plusieurs semaines de râles à bas bruit à l’encontre des « boutiques de nains » que nous prospectons, nous tombons enfin sur un rayon à sa taille. Là, il devient odieux et embarque n’importe quel vêtement trop grand sans l’essayer, insistant sur le fait que rien ne lui va dans « ce monde de nains », dans cette « vie de m… » et qu’il ferait mieux de se fiche en l’air, glissant à nouveau dans une brouille infinie. On peut probablement dire que sa claustrophobie, c’est avant tout sa rumination. Quel traitement de sa « claustrophobie »?
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Association Mondiale de Psychanalyse – World Association of Psychoanalysis
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