On
pense volontiers qu’après l’enfance c’est l’adolescence. Pourquoi pas ?
C’est une construction qui complexifie le passage de l’enfant à
l’adulte, qui limite les droits de ceux qui ne sont pas encore adultes,
mais en diminue aussi les devoirs. Dès lors, d’ailleurs, l’adolescence
se prolonge volontiers. On parle du syndrome de Tanguy et des
nombreuses formes de refus d’assumer ses choix et leurs conséquences ou
simplement d’un retard pris en ce sens.La
sortie n’en est d’ailleurs pas toujours simple. Lacan l’articule à la
fonction de l’Idéal du Moi, pour autant qu’ait opéré la fonction
paternelle. Mais à défaut de cette fonction, et même de façon plus
générale dans le monde d’aujourd’hui, c’est le symptôme qui dans sa
singularité permet au sujet de se construire cette sortie.Mais
cette sortie de l’enfance s’anticipe aussi. Sort-on de l’enfance quand
on entre dans l’adolescence ? Mais on connaît bien des jeunes
aujourd’hui qui avant ce moment de bascule se disent déjà pré-ados et
contestent le terme infantilisant d’enfance. Ce sont les effets de
cette construction.Alors
quand au juste sort-on de l’enfance ? On pourrait penser que ce sont
les choix sexuels qui déterminent ce moment. Choix d’identifications et
choix d’objet.On
sait que les choix d’objet – homo ou hétéro – peuvent se faire très
tôt. Mais avec Freud nous pouvons remarquer qu’ils ont à se refaire au
moment de la poussée pubertaire. Qu’on les considère comme choix ou
choix forcés le sujet doit les assumer comme tels. Mais ce choix d’objet
ne concerne pas seulement l’orientation quant au sexe de l’autre, il
est aussi le choix d’un mode de jouissance. La Journée Uforca consacrée
aux Modes de Jouir a mis en évidence le côté tardif du choix du mode de
jouissance, jusqu’à 25 ans.L’identification
sexuelle se construit pour chaque sujet comme Lacan l’indique dans ses
formules de la sexuation : par choix, quelque soit le sexe propre. La
biologie n’est pas sans incidence dans le choix, mais elle n’est pas — à
elle seule — le destin. Cette question se pose d’ailleurs dès
l’enfance et n’est pas signe d’un « après l’enfance ».La
question du genre telle qu’elle est aujourd’hui traitée en Amérique, au
nord comme au sud, est enseignante à ce propos. Avant même ce moment
où se pose l’après par rapport à l’enfance, la question du genre est
posée par certains. Au-delà de toute question sur la structure clinique
cela demande une réponse au cas par cas, bien avant les moments de
l’éveil sexuel adulte.La
poussée pubertaire, prise au sens biologique des hormones, participe
certes à ce moment de sortie. Mais cela ne se produit « pas sans
l’éveil de leurs rêves ». C’est dire que la sortie de l’enfance est une
construction qui pour chaque sujet fait réponse à un réel. Et le moment
de cette sortie est très ouvert à nos interrogations.En un sens, la sortie de l’enfance, c’est le choix d’un style de vie.Alexandre Stevens