Parlons chiffres. Lors du référendum, l’OXI a obtenu 61% des suffrages, le NAI 39%. On nous dit par ailleurs que 70% des Grecs voulaient rester dans l’euro.
Il en ressort qu’il n’y avait pas de symétrie entre les deux options du vote : le NAI était univoque tandis que l’OXI était équivoque. Les électeurs se répartissaient en effet sur trois et non deux options.
– Option A : quitter l’euro. 30%
– Option B : y rester. 39%
– Option C : y rester, mais sous conditions (sans austérité ou avec moins d’austérité). 31%
Pourquoi la question référendaire a-t-elle été formulée comme elle l’a été, d’une façon dont le caractère croquignolesque a été noté par tous les observateurs ? Pour une raison très simple : afin d’amener les partisans de l’option A à mêler leurs suffrages avec ceux de l’option C.
Tsipras aurait mis aux voix sa politique (l’option C), il était écrasé. Donc, il ne l’a pas fait. Il a fait voter sur une proposition obsolète des créanciers, sorte de MacGuffin (Hitchcock), attirant ainsi dans son orbite les pro-Grexit (option A). Puis, dès le lendemain, il les a largués pour faire l’unité avec les anti-Grexit (option B).
La synthèse (A+C) lui avait procuré son triomphe au référendum, elle ne lui permettait pas de négocier. Il lui a aussitôt substitué la synthèse (B+C).
Parfait pour appâter les pro-Grexit, Varoufakis devenait un repoussoir dès lors qu’il s’agissait d’attirer les pro-euro. Son élimination était logique. Il a été exécuté sans phrase.
Il apparaît ainsi que l’option B, défaite dans les urnes, est néanmoins gagnante ; que les partisans de A sont cocus ; que toutes les tensions se rassemblent sur l’option C. Les partisans de celle-ci devraient maintenant se diviser en deux, entre C1, ceux qui donnent le pas à l’anti-austérité, et C2, ceux qui sont avant tout pro-euro.
Diverses informations semblent indiquer que C1 a les faveurs d’un tiers des votants C, les deux autres tiers se rangeant sous C2. Si c’est exact, le basculement de Tsipras lui conserverait grosso modo les chiffres du référendum : 60% pour, 40% contre.
L’histoire ne s’arrêtera pas là.
Sous la pression américaine, les Allemands devront vraisemblablement céder, et on verra sans doute le Conseil européen accorder à la Grèce les biffetons nécessaires à payer ses dettes les plus urgentes. Mais qui sait si Tsipras tiendra ses promesses austéritaires ?
Un homme politique français récemment disparu a dit sur les promesses quelque chose qui est à retenir : qu’elles n’engagent que ceux qui les reçoivent.