Après la publication du 3e Plan autisme, ma lettre ouverte à Madame la ministre Carlotti, le communiqué de Jacques Borie, Président du Centre Thérapeutique et de Recherche de Nonette, ont rencontré le mur des médias. Seul le journal L’Humanité a finalement consenti à nous ouvrir ses colonnes.
Je regrette que, par leurs réponses standards, ils se fassent complices de la sauvagerie, sans se rendre compte que madame Carlotti pense plus à sa campagne électorale à Marseille qu’aux autistes, à leurs parents et à ceux qui les accueillent et les traitent au un par un. Mais les réactions ne manquent pas de se manifester, de la part de collègues professionnels et d’associations de parents [lire, ci-dessous, la lettre ouverte de la présidente de La main à l’oreille].
Cela laisse à penser que ce plan sinistre et scandaleux ne passera pas comme ça.
Après Lacan Quotidien, Le Feuilleton du RI3 publie ces trois lettres, qu’il ne faut pas hésiter à diffuser largement.
Dr Jean-Robert Rabanel
Lettre ouverte du Docteur Jean-Robert Rabanel,
Responsable thérapeutique du Centre Thérapeutique et de Recherche de Nonette
Président du RI3 (Réseau international des institutions infantiles)
à Madame Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée
aux Personnes handicapées, à propos du troisième plan autisme.
Madame la Ministre,
Le Troisième plan Autisme s’appuie sur des arguments qui ne correspondent pas à la réalité de ce qui se pratique dans les institutions médicosociales et de pédopsychiatrie.
Ce plan ne contribue pas à pacifier la situation en favorisant une partie aux dépens de l’autre. Il sème la discorde et entretient les divisions. Il favorise abusivement une partie plutôt qu’une autre. Il est à l’envers de la politique que l’on pouvait attendre d’un gouvernement socialiste.
Il est en particulier erroné de dire que depuis quarante ans la prise en charge de l’autisme, en France, a été dans les mains de la pédopsychiatrie et tout spécialement de la psychanalyse et, qu’au regard des résultats, il n’est que justice de donner sa chance à des méthodes éducatives. Prendre appui sur cette fable diffusée par certaines associations de parents extrémistes est grave. La réalité est que depuis trente ans, la psychanalyse n’est plus la référence des psychiatres qu’elle a pu être dans les années 1960-70. Dans quel but désigner les psychanalystes comme bouc émissaires ?
Quel a été le coût des cliniciens formés à la psychanalyse dans les prises en charge des enfants autistes et de leurs familles depuis 40 ans ? La volonté politique de ce plan prend-elle, sérieusement, en compte les conséquences économiques pour les collectivités et pour les familles que cette substitution entraînera ?
Ne craignez-vous pas de défaire ce que le mouvement des solidarités, après-guerre, avait construit en créant ces institutions ? C’est une douloureuse surprise de voir un gouvernement socialiste aller plus avant que les réalisations du gouvernement précédent à contre-courant de la solidarité.
Que devient la possibilité des parents d’exercer leur libre choix de ce qu’ils considèrent être le mieux pour leur enfant ?
Quel sens peut bien avoir ce passage autoritaire d’un soi-disant tout psychiatrique à maintenant un tout éducatif ?
Tout le monde comprendrait que, dans ce changement de cap, le plan se réfère à la HAS, mais ce n’est le cas. La HAS avait refusé les 3i, mais elle n’avait pas interdit la psychanalyse. Ce plan va plus loin que la HAS, au profit de MM. Fasquelle et Rouillard pour servir des thèses extrémistes. Cela est inquiétant.
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Le 2 juin 2012, l’ACF-Massif-Central organisait à Tulle, avec l’Institut Psychanalytique de l’Enfant, un forum pour l’abord clinique de l’autisme. Ce Forum s’est tenu, grâce à la bienveillance de Monsieur François Hollande, salle Corrèze à l’Hôtel du Département « Marbot ».
Il réunissait de nombreux praticiens d’institutions corréziennes du médico-social et de pédopsychiatrie. Ils ont dit leur inquiétude devant un projet de loi qui visait à l’époque à interdire la psychanalyse et les pratiques voisines dans l’accompagnement des enfants autistes et de leurs familles. La Haute Autorité de Santé elle-même, après avoir invalidé ces pratiques, hésitait, faisant le constat que cette question excédait ses strictes compétences scientifiques et objectives car elle met en jeu la dimension humaine et subjective.
Ces professionnels ont témoigné de la variété de pratiques attachées à la dimension du cas par cas. Ils ont dit l’intérêt qu’ils voyaient à offrir aux sujets qui leurs sont confiés un choix de méthodes différentes.
Les méthodes éducatives n’ont jamais été exclues des prises en charge. Nous ne demandions pas le choix d’une méthode aux dépens d’une autre, mais un juste équilibre dans la répartition des pratiques cliniques et des pratiques éducatives, certains enfants prenant appui plutôt sur les unes que sur les autres.
Il n’y a pas une réponse aux difficultés des enfants et des adultes autistes, car l’autisme n’est pas un. L’autisme est divers, chaque cas est singulier.
Nous considérons qu’il est du devoir du service public d’offrir aux enfants, aux adultes et à leurs parents l’accompagnement qui convient le mieux à leur cas particulier.
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Je regrette que, dans le plan, il ne soit fait état du travail fait dans des institutions qui se réfèrent au discours analytique autrement que pour indiquer qu’elles ne seront peut-être plus subventionnées.
Permettez que je dise un mot de l’institution de Nonette dont je suis, depuis 1973, le responsable thérapeutique et dont le Directeur est Jean-Pierre Rouillon.
Le Centre Thérapeutique et de Recherche de Nonette accueille des enfants, des adolescents et des adultes psychotiques et autistes qui vivent de façon civilisée grâce à l’apport du discours analytique.
Le Centre est constitué de trois établissements :
– un I.M.E qui accueille 24 enfants et adolescents.
– un Foyer occupationnel qui accueille 10 adultes.
– un Foyer d’accueil médicalisé qui accueille 10 adultes.
La moitié des personnes accueillies sont autistes ou présentent des troubles autistiques.
Depuis les années 1970, le Centre accueille des personnes présentant d’importants troubles de la personnalité qui, suite à une prise en charge en pédopsychiatrie, doivent bénéficier d’une prise en charge institutionnelle au long cours. C’est dans ce cadre que nous accueillons, depuis les années 1990, des sujets autistes. Nous avons accueilli ces enfants sur demande des organismes de tutelle. Plusieurs des enfants qui nous ont été adressés par les CDES, puis la MDPH, ont bénéficié de traitements éducatifs et scientifiques, n’ayant pas donné les résultats escomptés. Nous les accueillons ainsi parce que les traitements éducatifs ont été des échecs.
L’accompagnement des sujets se fonde avant tout sur la rencontre et sur la relation avec l’autre. C’est en maintenant la prise en compte de la particularité de chaque sujet que nous construisons un accompagnement qui respecte la dimension subjective de chacun, aussi bien celle des résidents que celle de leurs parents. La référence à la psychanalyse permet d’élaborer et de mettre en œuvre l’accompagnement des sujets en maintenant sans cesse au travail la question de l’éthique. C’est aussi à partir de cette dimension que nous dialoguons avec les tutelles dans le but de faire reconnaître et respecter la créativité de chacun des sujets que nous accueillons.
Le Centre est géré par une Association que préside un collègue de Lyon, Jacques Borie.
Nous ne possédons pas de moyens considérables et la référence au discours analytique permet aux éducateurs de s’orienter dans la vie quotidienne en respectant les choix du sujet ainsi que ceux de ses parents. Cela n’est possible qu’en prenant le temps d’élaborer patiemment le parcours propre de chaque sujet. C’est à partir de ce travail qu’un tempérament peut être apporté aux diverses manifestations de l’agressivité, qu’il s’agisse des automutilations ou bien des passages à l’acte.
Au fil des ans, nous avons été surpris par les capacités d’invention et de création de ces sujets qui ont pu trouver un style de vie les mettant à distance de ce qui les envahit et les ravage.
L’accompagnement au quotidien des autistes constitue un des points essentiels de la pratique clinique au CTR de Nonette.
La logique de l’autiste est d’éviter l’autre. La rencontre avec ce dernier est source de violence, difficile et délicate à arrêter. Dès le surgissement de l’objet, l’agressivité se déchaine. Les réponses habituelles en terme de maîtrise, d’interdit, ne conviennent pas. Il faut trouver d’autres types de réponses, écarter le sujet autiste de la pulsion de mort à l’œuvre. Introduire des écarts, aménager des abris à chacun des sujets qui en donnera une indication, permet d’obtenir un un certain résultat.
Vouloir pour l’autre doit laisser place à la recherche et à la découverte de la logique du cas, pour la dégager, et la privilégier pour s’en servir comme point d’appui de l’accompagnement.
Pour trouver un contact avec le sujet, il est préférable de se positionner en deça de lui plutôt qu’au-dessus de lui et de valoriser son invention. C’est s’accorder à lalangue du sujet. Faire moins bien que lui. Valoriser ce que le sujet fait non pas par générosité d’âme, mais parce que ça pourrait être pire. C’est l’enseignement de Lacan qui invite à considérer dans le symptôme une part d’invention.
Cette clinique abat les recettes, les conformités, les tous pareils. Elle fait la place au singulier déroutant, insolite, imprévu, aux mots esquissés, bredouillés, aux sons étouffés, triturés, torturés, aux ratures, au vivant. Des bricolages à partir des bouts de lalangue du sujet, la position analytique lui permet d’accuser réception de la souffrance, de soutenir et, peut être plus que tout, de reconnaître le dire du sujet autiste.
Ces conditions permettent d’apprendre leur langue singuliére pour leur offrir une vie digne avec leur symptôme.
Pour obtenir des résultats, il faut du temps, du savoir-faire des éducateurs et du travail analytique. L’expérience clinique auprès de ces sujets, l’élaboration des questions cliniques rencontrées permettent de dessiner des voies nouvelles pour prendre soin de ces sujets et les accompagner dignement. Les résultats d’un traitement par la psychanalyse d’orientation lacanienne sont civilisateurs pour les sujets autistes et psychotiques.
Aujourd’hui, ce qui permet de mesurer la réalité de ce parcours, c’est le témoignage que nous apportent les personnes qui viennent visiter Nonette. Ce qui les marque tous, au un par un, c’est la façon dont chaque résident leur réserve un accueil authentique.
Je vous propose, Madame la Ministre, de venir voir comment on vit dans ce lieu.
Avec le Directeur, nous serons heureux de vous accueillir.
Soyez assurée, Madame le ministre, de ma considération.
Nonette, le 7 mai 2013.
Centre Thérapeutique et de Recherche de Nonette – A.G.C.T.R.N – 63340 NONETTE
Institut Médico-Educatif – Foyer Occupationnel – Foyer d’Accueil Médicalisé
Communiqué du Président de l’AGCTRN suite au CA du 7 mai 2013
La publication récente du troisième Plan autisme ne peut laisser notre Association sans réaction. Depuis très longtemps nous gérons le Centre thérapeutique et de Recherches de Nonette qui reçoit des sujets enfants comme adultes autistes ou gravement psychotiques.
Nous assumons avec responsabilité les fonctions qui sont les nôtres de gestion de l’argent public d’accueil des personnes qui nous sont confiés, d’employeur des salariés qui y travaillent, de propriétaires des locaux où ils sont accueillis etc… Tout cela dans un dialogue constructif avec les autorités de tutelles qui nous font confiance.
Mais la particularité de notre Association est de soutenir l’orientation du travail qui y est faite en référence à la psychanalyse, sous la responsabilité du Docteur Jean-Robert Rabanel depuis 1973 !
Nous soutenons cette orientation car nous en voyons les effets bénéfiques sur nos patients même (et peut-être surtout) les plus gravement perturbés.
Nous voyons des personnes pour qui toute autre mode prise en charge a été un échec devenir plus en paix moins violentes moins agressives, s’ouvrir un peu plus aux autres, bref se civiliser sans qu’aucune pratique injonctive ne soit mise en œuvre.
Nous voyons des personnes pour qui toute autre mode prise en charge a été un échec devenir plus en paix moins violentes moins agressives, s’ouvrir un peu plus aux autres, bref se civiliser sans qu’aucune pratique injonctive ne soit mise en œuvre.
Il s’agit pour nous de vivre ensemble et d’accompagner au quotidien en vue de pacifier les symptômes. Tous ceux qui viennent à Nonette peuvent apprécier ce travail et ses résultats. Nous les accueillons avec plaisir.
Notre Association incarne de plus, dans sa composition même, cet esprit d’ouverture, puisque son Conseil d’administration est composé, outre de psychanalystes, de représentants des parents, des médecins responsables des secteurs psychiatriques, des partenaires du secteur médico-social, des élus locaux etc…
La fable selon laquelle les psychanalystes culpabiliseraient les parents est ainsi déconstruite concrètement. De même la référence à la psychanalyse dans le traitement des autistes n’exclue nullement les autres modes de traitement et de prise en charge.
Nous recourons aux bénéfices de la médecine (médicaments etc..), de la pédagogie (nous avons une classe de l’éducation nationale in situ) et des pratiques éducatives diverses. Pour nous, il n’y a nulle opposition entre un point de vue thérapeutique et un point de vue éducatif.
La psychanalyse, selon notre expérience, permet une éducation non coercitive et respectueuse des particularités de chacun.
Nous savons bien que d’autres pratiques de prise en charge des sujets autistes existent et ne prétendons nullement incarner un savoir exclusif sur ces douloureuses questions mais nous pensons que notre expérience de tant d’années a fait les preuves de sa pertinence et qu’on ne peut entraver sa poursuite sans atteinte grave aux droits des sujets et au minimum de démocratie que la France incarne dans le monde.
Dans cet esprit nous sommes disponibles à tout débat tout en affirmant vouloir poursuivre le travail de notre communauté qui permet une vie plus humanisée à tant de sujets qui souffrent d’insupportable.
Jacques Borie
Le Président de l’Association du Centre Thérapeutique et de Recherches de Nonette
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Lettre ouverte de Mireille Battut, présidente de l’association
La main à l’oreille à Marie Arlette Carlotti,
au sujet de la présentation du 3ème plan autisme
Madame la ministre,
Je viens de recevoir votre appel à soutenir votre candidature à la mairie de Marseille, sur la boite mail de l’association que j’ai créée, La main à l’oreille.
La main à l’oreille est née en 2012, année consacrée à l’autisme Grande cause nationale, pour porter une parole autre : nous refusons de réduire l’autisme à la seule dimension déficitaire et sa prise en charge à la seule approche rééducative, nous voulons promouvoir la place des personnes autistes dans la Cité, sans nous référer à une norme sociale ou comportementale.
C’est en 2012 que vous avez découvert l’autisme. Vous repartez maintenant vers d’autres aventures, mais vous nous laissez un 3ème Plan Autisme rapidement ficelé, accompagné de déclarations martiales : « En ouvrant ce dossier, j’ai trouvé une situation conflictuelle, un climat tendu, je n’en veux plus. » Vous avez, en effet, vécu des moments très chahutés. J’en ai été témoin lors d’un colloque au Sénat dédié à l’autisme, où un groupe de parents bien déterminés vous empêchait de parler. Le député Gwendal Rouillard, votre collègue, qui a choisi de soutenir les plus virulents, était à la tribune, les yeux mi-clos et le sourire aux lèvres. Comme vous étiez toujours coincée sur le premier paragraphe de votre discours, il a levé un bras et a demandé silence aux parents en les mettant en garde « ne prenez pas la ministre pour cible, n’oubliez pas que votre véritable ennemi, c’est la psychanalyse ». La salle s’est calmée et vous avez pu poursuivre votre propos, après avoir jeté un regard de remerciement à celui qui vous sauvait ostensiblement la mise. Vous avez retenu la leçon : vous ne voulez plus de parents chahuteurs dans vos meetings. Aussi, en partant, vous donnez des gages : « En France, depuis quarante ans, l’approche psychanalytique est partout, et aujourd’hui elle concentre tous les moyens ». Vous savez pourtant, en tant que Ministre, que depuis trente ans la psychanalyse n’est plus dominante en psychiatrie, que les établissements médico-sociaux ainsi que les hôpitaux de jour ont intégré des méthodes comportementales ou développementales dans leurs pratiques et que le problème majeur, c’est le manque de place et de moyens. Est-ce à cause de la psychanalyse que les enfants autistes restent à la porte de l’Ecole républicaine ? C’est donc en toute connaissance de cause que vous vous faites le relai d’une fable grossière, dictée à la puissance publique par quelques associations extrémistes.
Dès votre arrivée, vous avez annoncé que vous seriez très à l’écoute des parents. Il eut été plus conforme à la démocratie d’être à l’écoute des différents mouvements de pensée. « Les » parents, ce n’est ni une catégorie, ni une classe sociale. Il y a abus de généralisation dans la prétention du « collectif autisme » à s’arroger la parole de tous « les » parents. Vous ne pouvez pas ignorer qu’il y a d’autres associations représentant d’autres courants de pensée puisque nous avons été reçus par votre cabinet où nos propositions ouvertes et constructives ont été appréciées, et où l’on nous a assurés que le ministère n’avait pas vocation à prendre parti quant aux choix des méthodes. C’était le moins que nous demandions. Nous ne cherchons à interdire ou à bannir quiconque, et surtout pas qui pense différemment. Nous sommes trop attachés à la singularité, qui est l’agalma de ce que nous enseignent nos enfants.
« Il est temps de laisser la place à d’autres méthodes pour une raison simple : ce sont celles qui marchent,… Permettez-moi de m’étonner que vous n’ayez pas attendu pour affirmer cela que les 27 projets expérimentaux, tous attribués unilatéralement à des tenants de l’ABA par le précédent gouvernement, et jugés sévèrement par vos services comme trop chers, aient été évalués. La diversité et la complexité du spectre autistique peuvent justifier différentes approches, en tout cas, vous n’avez rien de concret permettant d’étayer le slogan de l’efficacité-à-moindres-couts-d’une-méthode-scientifique-reconnue-dans-le-monde-entier- sauf-en-France. En Amérique, le conditionnement comportementaliste est fortement critiqué, notamment par des personnes se revendiquant autistes, aussi bien pour son manque d’éthique, que pour ses résultats en fin de compte peu probants, conduisant parfois à de graves impasses thérapeutiques.
…et qui sont recommandées par la Haute Autorité de Santé. ». Si, en privé, vos services reconnaissent que le ministère a choisi de s’appuyer sur ces recommandations, en l’absence d’autres bases, encore faut-il ne pas en faire une lecture outrageusement simpliste se résumant à « une méthode ». La HAS s’efforçait tout de même de maintenir l’intégration des différentes dimensions de l’être humain, sous la forme d’un triptyque « Thérapeutique/pédagogique/éducatif ». Dans le 3ème plan autisme que vous venez de présenter, seul l’éducatif est maintenu. Le mot « thérapeutique » est employé une seule fois, de façon surprenante pour qualifier « la » classe de maternelle spécialisée pour les autistes, une par académie !
« Que les choses soient claires, n’auront les moyens pour agir que les établissements qui travailleront dans le sens où nous leur demanderons de travailler ». L’écrasante majorité des établissements a déjà prudemment annoncé être en conformité avec les recommandations de la HAS. Il faut donc entendre que vous souhaitez aller au-delà ? Votre volonté est clairement d’intimider tous ceux qui s’efforcent de mener une démarche au un-par-un et qui ne calent pas leur pratique exclusivement sur des protocoles dépersonnalisés. En faisant cela, vous transformez les intervenants en exécutants serviles, vous réduisez à néant l’apport pacificateur de la dimension thérapeutique face à la violence potentielle de la sur-stimulation, du dressage et de la volonté de toute-puissance. En procédant ainsi vous menacez directement tout le secteur médico-social au profit d’un système de services à la personne et de privatisation du soin, avec formation minimale des intervenants. D’autant que vous n’annoncez pas la création de nouvelles structures avant 2016.
La fédération ABA France revendique sans ambages « une approche scientifique qui a pour objectif la modification du comportement par la manipulation » destinée à tous les domaines, bien au-delà de l’autisme, de la psychiatrie à l’éducation en passant par la communication. On trouve dans leur programme les ingrédients du traitement qui vous a été réservé : définition externe d’un objectif cible, mise sous situation de contrainte du sujet, au cours de laquelle il sera exposé à la demande de l’autre de façon intensive et répétitive, la seule échappatoire étant de consentir à ce qui est exigé de lui. On comprend que vous soyez soulagée d’en finir. Si je tiens personnellement à éviter que mon enfant subisse ce type de traitement, j’attends aussi d’un ministre de la République qu’il sache y résister.
Madame la Ministre, si vous voulez mettre vos actes en accord avec les annonces de votre candidature à la mairie de Marseille « pouvoir rassembler les forces de progrès … et tourner la page du clientélisme… », il est encore temps pour vous de le faire, j’y serai attentive.
Mireille Battut
Présidente de La main à l’oreille
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