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JOURNAL DES JOURNÉES N° 45 le lundi 19 octobre 2009, édition de 15h 12
Jacques-Alain Miller: Editorial
Encore plongé dans le programme, je ne puis mettre en page les textes que je reçois. Je le ferai dès que j’en aurai fini avec cette tâche, au demeurant intellectuellement plaisante, et affectivement dédramatisée, dès lors que la perspective des Journées de Rennes, qui se tiendront les 10 et 11 juillet de cette année fait que je puis me dispenser de formuler aucun refus sec : lorsqu’un texte me paraît pouvoir gagner à être repris, repensé, ou refondu, précisé ou prolongé, élargi ou focalisé, je propose à l’auteur d’être accompagné dans son travail par un collègue fonctionnant comme mentor de rédaction et de recherche – ce qui satisfait en moi mon complexe de Hardy (le mathématicien, voir JJ antérieur) : ne rejeter personne, « Here Comes Everybody », aide samaritaine universelle.
« Pas très lacanien, tout ça, M. Miller ! – Oui, je sais, mais on ne se refait pas, même en choisissant comme analystes des types méchants. » Je suis méchant aussi, très, mais seulement avec les meuchants, et pour défendre la Veuve (la psychanalyse) et l’Orphelin (de Lacan). Bref, je suis passionnément, pour le meilleur et pour le pire, le Frère Aîné. Je ne développe pas, je ferai sur ce thème un exposé à Rennes.
Le point où j’en suis du programme. Sur la base du travail de lecture et sélection accompli par Pierre Naveau, j’ai d’ores et déjà validé les choix suivants : une série de 9 textes, d’analysants de Lacan, illustrant sa pratique comme analyste ; deux séries de 9 textes, soit 18, provenant d’AE ou ex-AE ; plus 61 autres textes, ce qui fait 88.
Il me reste donc à choisir 20 autres textes pour faire 108. Ces 20, je dois les sélectionner sur un ensemble de 69, qui sont au point, et sensiblement équivalents. Pour faire ce choix, il me faut anticiper, c’est à dire avoir déjà l’idée des paires que je vais former, et des effets de sens qu’il s’agira de produire. C’est là dessus que j’achoppe, « I agonize », depuis hier soir, et j’y ai travaillé très avant dans la nuit. Je veux que ces paires mettent en valeur des concepts et des sens qui, à la fois, ne soient pas bien connus, communs, lexicalisés, qui soient aussi originaux que possible, mais qui soient aussi bien fondés, fréquents en clinique, opératoires en pratique.
Je mets donc la barre assez haut pour la formation des paires, ça ralentit mon rythme, mais cela fait tout l’intérêt du travail que je m’appuie, cela valorisera des textes, qui sont déjà en eux-mêmes remarquables, et donnera leur éclat, je l’espère, et leur utilité à nos Journées. J’ai la même ambition pour Rennes, et je compte la réaliser mieux encore, car je serai instruit par cette expérience, et les collègues également.
Le restant des travaux demande à être perfectionné, et ce sera l’occasion d’étrenner la « méthode des mentors » que j’exposais la semaine dernière. Pierre Naveau est disponible pour cette tâche, je le serai également, et nous recruterons des collègues de bonne volonté, ayant les aptitudes et l’expérience requises, et prenant plaisir à aider leur prochain AMPG, pour la plus grande gloire de la psychanalyse. L’importance de cette dernière condition a été soulignée dans le Journal par ma chère Beatriz Udenio, forte de son expérience comme Secrétaire de notre Institut de Buenos Aires, qui a prospéré sous la direction de Leonardo Gorostiza. De celui-ci, vice-président de l’AMP, en piste pour succéder à Eric Laurent, nous aurons l’avantage d’écouter en séance plénière l’exposé personnel sur le thème des Journées, sous le titre « El calzador sin medida ».
Dans ce numéro. J’ai dit que je n’avais pas le loisir de mettre en page aujourd’hui les lettres et messages reçus pour le Journal. Je ferai une exception pour deux contributions que j’ai reçues presque simultanément.
La première est de Nathalie Jaudel. Notre collègue, comme elle l’explique elle-même, s’est enfin résolue à mettre avec art son hystérie de structure au service du bien commun, en se risquant à énoncer les exigences des générations « montantes » à l’endroit de l’Ecole. Il ne suffit pas, en effet, de dire qu’au delà de ses membres, l’Ecole est responsable au regard de la psychanalyse, car ça ne mange pas de pain. La psychanalyse, en attendant sa parousie – « Contemplez, votre Roi vient. », Matthieu 21: 5 – c’est vous, c’est moi, et spécialement c’est les « générations montantes », ceux qui aspirent à le devenir, analystes, et, accessoirement, membres de l’Ecole.
La seconde, de Jean-Daniel Matet, qui m’est parvenue hier soir tard, commençait de lui répondre comme par anticipation. Comme c’est bizarre ! Quelle coïncidence ! Voilà ce qui arrive quand on s‘inscrit dans la même chaîne signifiante, et que les significations qu’elle engendre se mettent à consister.
Je vois dans ces deux textes un « Debout les morts ! » digne de Signorelli. Sonnez, Trompettes ! Les Anges vous appellent au « Débat de l’Ecole », nouvelle rubrique du Journal.
L’Amritamanthana
par Nathalie Jaudel
Je l’avoue : je fais partie de celles à qui Jacques-Alain Miller tape avec bonhomie sur les doigts dans le paragraphe 8 du JJ 41. J’ai joué les Castafiore sur l’organisation des salles multiples (cf. le JJ 34), remis ça par la suite à l’occasion d’échanges privés au sujet de « Factorielle 36 » ; je prends maintenant au sérieux son invitation à rendre ma structure utile en contribuant au débat — mais s’agit-il vraiment d’un débat ? — précédant les élections.
Éole a entrouvert les flancs de la montagne où les Vents étaient retenus, murmurant et mugissant sous une masse de rochers. Euros l’impétueux, Boréas, le vent du Nord, Notos, qui amène pluie et tempêtes, et enfin Zéphyros, au souffle doux et puissant, qui transporta Psukhè dans le palais d’Eros, se sont enfuis et s’en donnent à cœur joie, soufflant tour à tour sur le bateau d’Otto.
Le frêle esquif, devenu, à force de changements de baus, paquebot, prend de la gîte et frémit, impatient de fendre les flots. Depuis quelques temps, on traversait un pot-au-noir et l’École était surtout attentive à ne pas casser son erre.
Quels efforts inouïs pour en arriver là ! Quelle énergie, et combien d’avatars, n’aura-t-il pas fallu à ce « diable d’homme », pour nous réveiller ! On frôle le barattage de la mer de lait par Vishnu (qui engendra notamment les Apsaras, nymphes célestes, cher Abel/Philippe)…
Une question, qui me semble fort à propos, a surgi sous la plume d’Edith Juignier dans le JJ 32 : « l’École […] était-elle trop figée pour avoir besoin à ce point d’un tel vent rafraîchissant ? »
Les Journées accueilleront Alain Prost et Jacques Stern, et nous sommes invités à grab the passer by : chouette, un peu d’air frais ! Nous étions nombreux à regretter l’interruption du cycle de conférences inauguré par Éric Laurent sous le titre de « L’année Dieu de l’ECF », hautement réjouissant s’il en fut, et qui nous a permis d’entendre, parmi d’autres, le sinologue François Julien et le biologiste Jean-Jacques Kupiec, la philosophe Françoise Balibar et le talmudiste Benny Lévy. Les portes de l’École s’étaient grand ouvertes sur le monde, on avait respiré le souffle du large. Depuis lors, elles n’étaient plus qu’entrebâillées et l’atmosphère se corrompait.
L’obtention, de haute lutte, de la reconnaissance d’utilité publique, n’est sans doute paradoxalement pas pour rien dans cette progressive glaciation. Jouissant désormais de la « grande personnalité », se sentant examinée par l’Autre de l’administration, soumise au risque de retrait disciplinaire de ce statut si chèrement obtenu et si crucial pour son avenir (même si une telle sanction semble n’avoir jamais été prononcée), l’École est devenue frileuse, réfrénant les audaces, tempérant les ardeurs, inquiète et retenue, très grande dame sur son quant-à-soi.
Les élections approchent. Elles décideront de notre orientation pour les deux ans à venir. Les candidats au Conseil font état, à juste titre, de leurs nombreuses contributions au dynamisme du Champ freudien. Ils semblent aussi s’écrier, presque d’une seule voix : « Que souffle sur l’École le vent des Journées… et cent mille fleurs s’épanouiront sous nos pas ». Fort bien, mais comment ? Va-t-on laisser Jacques-Alain Miller baratter dans son coin et sortir de son chapeau des inventions en veux-tu en voilà, journaldesjourner, twitter et que sais-je encore ? N’allons nous départager les candidats qu’à raison de leur appartenance à telle génération ou de leurs accomplissements passés, si bénéfiques furent-ils ?
La seule Assemblée Générale de l’École à laquelle j’aie assisté, c’était en 2007. J’étais nouvellement admise comme membre de l’ECF avec nombre d’autres issus de la « génération montante », sur la lancée de l’impulsion donnée au CPCT-Paris par Hugo Freda, l’un des premiers à avoir dit aux « jeunes » : « Vous, ici et maintenant ». Je me réjouissais d’assister aux échanges entre mes collègues, de les entendre débattre des orientations possibles, de voir se dessiner le futur de notre école. Quelle déception ! Blablabla et langue de bois. Une chambre d’enregistrement — l’Assemblée Nationale, en moins désertée. Loin de la définition du politique que nous offre Cynthia Fleury dans le JJ 23 : « Faire lien et créer une chose commune ». Pas trace d’une « démocratie éclairée, délibérative et inclusive ». Quant à l’action du Conseil et du Bureau au cours de ces dernières années, des débats qui les ont certainement agités, de leurs interrogations, de leurs délibérations, des décisions envisagées ou prises : motus et bouche cousue. Pas-à-savoir. Faudra-t-il attendre le XXIIe siècle pour qu’un peu de Glasnost accoste l’ECF ?
Quand va-t-elle commencer, la campagne électorale, pas celle du lobbying dans les couloirs, mais celle que permet le JJ, celle qui donne envie de voter pour telle ou tel au vu de ses projets et non de ses lauriers, avec programmes à l’appui, 101 propositions et autant de critiques, controverses et disputatio, même au risque de bâtons dans les oneilles ?
Projets
pour une présidence de l’ECF
2009-2011
par Jean-Daniel Matet
Dans moins de trois semaines se réunira l’Assemblée générale annuelle de l’ECF pour renouveler ses instances.
Lacan avait voulu mettre le cartel au cœur de la direction de son École, pour l’orienter, comme le mot de « Cardo » choisi alors l’indiquait (à l’origine étymologique de « cardinal »). La permutation continue à animer les statuts de l’ECF, et à donner à ses instances (Conseil et son bureau-Directoire), au-delà des changements de statuts voulus par l’utilité publique, une légitimité qui dépasse la personne qui exerce telle ou telle fonction.
C’est l’originalité de la direction de cette Association, qui concourt à lui donner cette force dans le débat publique, et son indépendance, qui doit être défendue vigoureusement.
Pour qui souhaite exercer la présidence, en se soumettant au vote de l’Assemblée pour être élu au Conseil, puis à celui du Conseil lui-même pour être élu président, il me paraît indispensable d’annoncer les horizons d’une action qui se veut volontaire, comme l’exige une École pour la psychanalyse.
Tout d’abord parce que cette action sera partagée. La direction de l’Ecole ne peut s’exercer seule, tant elle réclame de réunir des domaines de compétence variés.
1 – Fonctionnement du Directoire
Le souffle du vent nouveau qui a touché les Journées de cet automne, le projet de Journées à Rennes, le Journal des Journées, et le nouveau rapport que le directeur de ces Journée a instauré avec les membres de l’ECF, et, au delà, avec tous ceux qui sont orientés par l’École, inspirera son action.
Les indications données par Jacques-Alain Miller dans le JJ seront reprises avec attention. C’est un sérieux coup de brosse sur l’ensemble des modalités d’expression de l’École qui s’est ainsi manifesté. Nous en tiendrons compte, en réexaminant l’ensemble des médias de l’École. Le papier, avec la Lettre mensuelle et la Revue, sans oublier Quarto. Le numérique, avec le site qui a maintenant des qualités graphiques, et un contenu qui s’est beaucoup amélioré, mais exige encore un effort pour témoigner d’une vraie réactivité, le blog actuel des Journées qui doit trouver une suite, et tous les domaines où les applications numériques faciliteront les échanges entre les membres, le travail de chacun et le transfert à l’École.
Le Président
Pour son fonctionnement proprement dit, le Président réunit son bureau (Directoire), en anime les débats et rassemble ainsi les éléments des décisions à prendre. Il informe le Conseil des décisions du Directoire, et lui fournit les éléments pour que puisse s’organiser un débat sur les questions importantes. Les réunions du Conseil sont préparées avec le Secrétaire, qui aura à charge de transmettre, une semaine avant les réunions, un ordre du jour, et d’en faire le compte-rendu public sur ecf-messaager. De même, chaque réunion du Directoire donnera lieu à ordre du jour écrit, et compte-rendu public à l’Ecole et à ses entours, dont elle est également responsable..
La représentation de l’École à l’extérieur est du ressort du Président. Il devra en particulier assurer les liens avec l’AMP et ses instances, et ceux, anciens et précieux, avec le Champ freudien, la Présidente de la Fondation, et les groupes qui, en France, en Europe et dans le monde, accompagnent son développement, ainsi qu’il veillera à la préparation des rencontres PIPOL .
Le Vice-Président
Le Vice-Président sera plus particulièrement chargé des échanges avec l’École dans les régions, les membres, mais aussi les ACF, les CPCT, les associations de praticiens, et aura aussi en charge l’importante question des cartels, qui garde une place fondamentale dans le fonctionnement « en chair » de l’École. Plus que par le passé, il devra déléguer, les fonctions de représentation dans les ACF, à l’occasion des AG des ACF, pour privilégier l’élaboration d’une politique de développement des activités de l’ECF dans les régions.
Le Secrétaire
Le Secrétaire aura la charge de veiller à la tenue des documents qui témoignent du fonctionnement du Directoire et du Conseil, à leur diffusion éventuelle, à la bonne marche des programmes d’enseignement, et à l’annonce régulière des manifestations de l’École. Le courrier n’existe plus avec la régularité des sorties papier, mais il devra veiller à la forme et au contenu d’une informations de/vers l’Ecole et ses entours.
Le Trésorier
Le trésorier, en liaison régulière avec l’expert-comptable, donnera au Directoire un tableau de bord tous les deux mois, qui permettra d’éclairer la prise de décision, et les engagements financiers et budgétaires du Directoire. La passe et les admissions (la garantie) Le Président veillera personnellement au bon fonctionnement de ces deux modalités, essentielles pour l’École, d’accueil de nouveaux membres. C’est un dispositif fondamental, où s’évalue la formation de l’analyste, qui doit rester une préoccupation majeure de la politique du Directoire et du Conseil de l’ECF. Les enseignements Les enseignements au local doivent s’entourer d’un nouveau lustre, et le local doit être un lieu d’échange, de débats, d’accueil des collègues étrangers, comme de personnalités qui apprécient de débattre avec nous. Un programme annuel de conférences publiques (style « Année-Dieu ») sera établi. Le local Le local de la rue Huysmans est le local central de l’ECF et son histoire comme son usage actuel ne justifient pas d’en changer. Si d’autres projets auxquels l’ECF pouvaient être associés (type UFORCA) voyaient le jour, il serait légitime d’en envisager l’opportunité, sans remettre en question le local de la rue Huysmans. La bibliothèque La bibliothèque sera l’objet d’une attention particulière pour ce que suppose son extension et son développement, la part croissante prise par le numérique et ses conséquences sur ces différents points. Une prospective à cinq ans au moins devra être établie, en tenant compte de son intégration dans le réseau des bibliothèque du Champ freudien.
2-Fonctionnement du Conseil Point essenteil, que je dévellopperai dans la suite de ce texte. A suivre Les Journées 38 ont lieu les 7 et 8 novembre prochains à Paris, au Palais des Congrès ECF 1 rue Huysmans paris 6è Tél. + 33 (0) 1 45 49 02 68 S’inscrire sur www.causefreudienne.org diffusé sur ecf-messager, forumpsy, et amp-uqbar