PIPOL IV | Barcelone 11 et 12 juillet 2009 |
4ème Rencontre européenne du Champ freudien | |
Bulletin de préparation et d’informations à la Rencontre | |
Clinique et pragmatique de la désinsertion en psychanalyse |
Date : jeudi 9 avril 2009 Modérateur : Judith Miller
Compte- rendu de la soirée préparatoire
du 3 avril 2009 à l’ECF
Figures féminines de la désinsertion
Daniela Fernandez et Bénédicte Jullien ont présenté chacune un cas de déprise sociale caractérisé par des difficultés d’insertion dans le monde professionnel. Ainsi qu’Esthela Solano-Suarez a pu le mettre en évidence dans ses commentaires, ces femmes ont un diplôme, dont ni l’une ni l’autre ne parvient à se servir. Leurs difficultés et leurs positions subjectives respectives sont cependant radicalement différentes. La patiente que Bénédicte Jullien reçoit dans le privé est tétanisée par l’idée que son diplôme exigerait d’elle l’exercice d’un savoir sans défaut. Ses difficultés avec le savoir remontent à l’école primaire, où l’instituteur voulait la forcer à écouter et faisait comme son père qui voulait la gaver de savoir. Bien plus tard, la réussite d’un examen, et la parole fatidique de son père : « Je n’en attendais pas moins de toi », lui enlève, dit-elle, la mention obtenue. L’obtention du diplôme la renvoie à la castration. Alors, elle triche, elle se débrouille avec des petits boulots sans lien avec son diplôme. Elle tente de partager le pouvoir avec son patron. Elle cherche querelle à son fiancé dès qu’elle travaille car elle le déphallicise. Son véritable partenaire est sa mère. Elle aurait voulu être à la place de son frère aîné avec lequel elle se battait souvent dans l’enfance, afin de satisfaire sa mère. À vouloir occuper la place du phallus imaginaire, elle est condamnée à n’être jamais à la hauteur, à ne satisfaire l’autre en rien. Elle s’emploie à substituer au manque de l’Autre sa demande, selon une logique hystérique de la privation. C’est ainsi qu’une femme ayant horreur de sa féminité peut se trouver empêchée de travailler. L’obtention d’un diplôme pour la patiente de Daniela Fernandez eut des conséquences différentes. Dramatiques, irréversibles : cette femme qui se soutenait de son statut d’étudiante depuis trente ans est littéralement éjectée. Sa chute témoigne d’une rupture avec le semblant. Elle perd le peu de représentabilité qu’elle avait pour se présenter sur la scène du monde. Elle se soutenait d’un signifiant primordial, « l’étudiante », son diplôme la déloge de cette place. Sa relation avec un partenaire relève du ravage : iI la bat, mais il lui dit qu’il n’aime qu’elle. Son existence ne se soutient que d’un signifiant et d’un seul homme. Deux opérations lui permettront de retrouver un rapport plus digne au signifiant. L’analyste refuse de la regarder quand elle se présente en femme battue et de jouir de ce qu’elle lui montre. La patiente lui dira: « Vous m’avez fait honte ». Ici, la honte fonctionne comme un voile. Par ailleurs, au lieu de regarder son visage tuméfié, l’analyste introduit la dimension du produit en demandant son book. À la suite de quoi, la patiente fera le premier sourire de son traitement. Un troisième temps permettra de cerner un signifiant-maître, celui de « la déracinée ». Son projet, durant trente ans et que le diplôme lui semblait clore, était une tentative de coudre le trou produit par le déclenchement de sa psychose lorsqu’elle avait dix ans. Sa mère l’avait emmenée vivre en province, elle s’était trouvée comme sur une autre planète, totalement déracinée, sans repères, perdue, exclue du lien social. Pour couvrir hors sens, le hors lien elle poursuivra sans relâche son projet : concevoir des logements pour des étudiants déracinés. Diplôme ou pas, pour elle, l’insertion est une entreprise qui doit durer toute une vie. Laura Sokolowsky VIe et dernière soirée préparatoire à l’ECF
Peut-on parler d’enfant désinséré ?
avec Armelle Gaydon et Dominique Holvoet.