grand meeting pour que vive la psychanalyse
9 et 10 février à la mutualité
Communiqué n°11
Chers collègues, “La Lettre en ligne” de l’ECF diffusait hier ma première diatribe anti-cognitiviste. Je reçois ce matin un mail de notre collègue Rabanel que je vous communique aussitôt (voir ci-dessous). Par ailleurs, mon ami Saint-Clair Dujon me signale le colloque des Laboratoires de sciences humaines et sociales de l’ENS tenu le 30 novembre dernier, de 9 à 18h, sur le thème Evaluer, dévaluer, réévaluer l’évaluation. “En particulier, m’écrit-il, intéressante intervention de Barbara Cassin sur « la qualité est-elle une propriété émergente de la quantité? », où elle développe ce qu’est l’idéologie Google : une citation, c’est un vote ; un clic sur un site, c’est un vote. Le mode d’évaluation de la recherche entraîne le chercheur à prendre l’instrument d’évaluation pour but de la recherche (publier pour être cité, pas pour avancer). Pour la langue de l’évaluation, voir Klemperer (Victor), Lingua Tertii Imperii. L’enregistrement sonore de ce colloque devrait être mis sous une semaine (en principe) sur le site « diffusion des savoirs » de l’ENS”. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 5 décembre 2007
Mail de Jean-Robert Rabanel ce matin, 10h37
Cher JA Miller,
Après lecture de vos réponses à “La Lettre en ligne”, je voudrais vous dire un mot au sujet de Jean-Marc Monteil. C’est d’abord un souvenir.
Lors de la création de la Section clinique de l’Institut du Champ freudien à Clermont-Ferrand, je vous avais demandé de faire un courrier au doyen de la Faculté des Lettres pour qu’il accepte de nous louer des salles. Celui-ci avait accédé à notre demande, tout en nous priant d’en référer au Président de l’Université de l’époque, qui était justement M. Monteil.
Au téléphone, celui-ci ne me fit pas d’objection, précisant que nous étions si différents que nous ne nous porterions pas tort. Il ajouta aimablement qu’il avait pu apprécier favorablement l’aide que j’avais apportée en tant qu’analyste à quelqu’un de son proche entourage.
C’est le seul contact que j’ai eu avec J.M. Monteil, et, comme vous le voyez, il a été empreint de courtoisie. J’ai connu ensuite le déroulement de sa carrière, à Bordeaux d’abord, puis à Paris. À l’Université Blaise-Pascal de Clermont, il avait créé, sur les ruines de l’Institut de psychologie appliquée, son Laboratoire de psychologie de la cognition ; il fut le Président de l’Université de 1992 à 1997. Il est ensuite devenu le recteur de Bordeaux, et il a écrit alors un important rapport intitulé “Propositions pour une nouvelle approche de l’évaluation des enseignants”, qu’il a remis à François Bayrou, ministre de l’éducation nationale. Je suppose que ce rapport est pour quelque chose dans sa nomination en juillet 2002 comme directeur de l’Enseignement supérieur. Le ministre qui l’a nommé était Claude Allègre. Il est devenu le 21 mars dernier le président du conseil de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), poste qu’il a du quitter le 22 mai, au moment il était nommé chargé de mission auprès de François Fillon. C’est sans aucun doute l’homme de l’évaluation dans l’Université française. C’est son successeur au Laboratoire de Clermont, le Pr Fayol, qu’il a choisi pour superviser les nombreuses équipes de l’AERES qui vont toute l’année durant expertiser tous les cliniciens et psychanalystes universitaires. C’est leur triomphe.
On peut se demander comment la Faculté de psychologie de Clermont, où Foucault avait enseigné, qu’il avait marquée de son enseignement, avait pu devenir un bastion du cognitivisme. Voici ce qui s’est passé.
Pour le seconder à Clermont, Foucault avait choisi Mme Pariente. Celle-ci devint la directrice de l’Institut de Psychologie Appliquée. C’était une clinicienne, et nous l’avons toujours soutenue, Simone et moi, une ancienne normalienne, comme son mari, le philosophe Jean-Claude Pariente, dont vous connaissez la réputation, et qui est encore venu faire une belle conférence en mars dernier à l’Association Cause freudienne, sur la notion de nom propre, que nous allons publier. Mme Pariente aurait beaucoup de choses à dire sur son combat à Clermont, son éviction, et la suppression de l’Institut de Psychologie Appliquée au profit du Laboratoire de J.-M. Monteil.
René Haby, le premier ministre de l’éducation nationale sous Giscard, promoteur du “collège unique”, fut recteur de l’Université de Clermont. Alice Saunier-Séité, qui lui succéda aux Universités en 1978, refit la carte des Facultés de psychologie, et éradiqua de Clermont la clinique au profit du cognitivisme. Ce fut surprenant à l’époque, d’autant que Mme Pariente était giscardienne en politique alors que M. Monteil, lui, était connu pour être de tendance PS. Toujours est-il que c’est ainsi que la “Fac de psycho” de Clermont devint ce qu’elle est devenue.
C’est maintenant le Pr Fayol qui règne en amître absolu sur la psychologie à Clermont. De Monteil à Fayol, en 30 ans, pas un seul professeur, pas un seul maître de conférences, pas un seul assistant, pas un seul chargé de cours qui ait été clinicien. Le désert. C’est au point qu’il n’y a pas de DESS de psychopathologie à Clermont, cas unique selon Jean-François Cottes.
Bien cordialement.
Jean-Robert Rabanel
PJ : saisie sur ordinateur de votre lettre au doyen de la faculté des Lettres de Clermont, en date du 30 mars 1992
DEPARTEMENT DE UNIVERSITE DE PARIS VIII PSYCHANALYSE PARIS, LE 30 mars 1992
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A Monsieur le Doyen
de la Faculté des Lettres
de Clermont-Ferrand
Monsieur le Doyen et cher collègue,
Je me permets de vous écrire au sujet d’une « Section clinique « à Clermont-Ferrand, qui se recommande du Département que je dirige à l’Université de Paris VIII.
Le Dr Jean-Robert Rabanel est connu et apprécié depuis des années de moi-même et de la plupart des membres de l’équipe doctorale « Psychanalyse et champ freudien » que j’anime au Département. En particulier, le Dr Rabanel a été invité à collaborer à la « Section clinique » de Paris, que nous avons créée dans le cadre du service de formation permanente de l’Université.
De nombreux psychanalystes ont voulu à leur tour créer de telles « Sections cliniques » à l’étranger. C’est ainsi que j’ai accepté de donner les auspices du Département à des « Sections » qui se sont ouvertes à Bruxelles, Madrid, Rome, et Barcelone. Ces établissements sont gérés de façon autonome par leurs responsables locaux, en général à travers des associations sans but lucratif. Par contre, les programmes, les contenus et les méthodes d’enseignement sont concertés avec nous.
Une « Section clinique » s’est ouverte l’an dernier à Bordeaux, avec plein succès. Le Dr Rabanel a voulu en créer une à Clermont, et je lui ai donné mon appui.
S’il était possible à l’Université de Clermont-Ferrand de mettre des locaux à la disposition de ce projet, je souhaiterais vivement qu’elle le fasse. A mon sens, un véritable intérêt public s’attache en effet à la divulgation d’un enseignement méthodique et rationnel de la psychanalyse : le désir de « réaliser sa personnalité » permet des exploitations éhontées ; on ne peut supprimer ce désir, que nourrit le « désenchantement » moderne ; mais on peut l’orienter vers une discipline de vérité, qui n’est pas incompatible avec une perspective scientifique, et qui a sa place dans l’Université : la discipline analytique.
Multiplier des « Départements universitaires de psychanalyse » serait souhaitable ; à défaut, l’Université, en aidant les « Sections cliniques », peut jouer un rôle salubre.
Veuillez agréer, Monsieur le Doyen et cher collègue, les assurances de ma haute considération,
Queridos colegas, “La Lettre en ligne” de la ECF difundía ayer mi primera diatriba anticognitivista. Recibo esta mañana un mail de nuestro colega Rabanel, que le comunico inmediatamente (ver al pie). Por otra parte, mi amigo Saint- Clair Dujon me señala el coloquio de los Laboratorios de ciencias humanas y sociales del ENS realizado el 30 de noviembre último, de 9 a 18 hs, con el tema Evaluar, devaluar, reevaluar la evaluación. »En particular, me escribe, interesante intervención de Barbara Cassin sobre « ¿la calidad es una propiedad emergente de la cantidad? », donde desarrolla lo que es la ideología Google: una cita, es un voto; un clic sobre un site, es un voto. El modo de evaluación de la investigación arrastra al investigador a tomar el instrumento de evaluación como objetivo de su investigación (publicar para ser citado, no para avanzar). Para la lengua de la evaluación, ver Klemperer (Victor), Lingua Tertii Imperii.
La grabación sonora de este coloquio debería estar subida en una semana (en principio) en el site « difusión de los saberes » del ENS. Cordialmente, Jacques-Alain Miller, 5 de diciembre de 2007
Mail de Jean-Robert Rabanel esta mañana, 10h37
Estimado JA Miller,
Luego de la lectura de sus respuestas a “La Lettre en ligne”, quisiera decirle una palabra a propósito de Jean-Marc Monteil. Es primeramente un recuerdo.
En ocasión de la creación de la Sección clínica del Instituto del Campo freudiano en Clermont-Ferrand, le pedí a usted escribir un correo al Decano de la Facultad de Letras para que acepte alquilarnos salas. Este accedió a nuestra demanda, rogándonos referirnos al Presidente de la Universidad en ese momento, que era justamente M. Monteil.
Este no me hizo ninguna objeción cuando hablé con él por teléfono, precisando que éramos tan diferentes que no habría problema. Agregó amablemente que había podido apreciar favorablemente la ayuda que yo había aportado como analista con alguien de su entorno próximo.
Es el único contacto que tuve con J.M. Monteil, y como usted lo ve, estuvo pleno de cortesía. Conocí luego el desarrollo de su carrera, en Bordeaux primero, luego en París. En la Universidad Blaise-Pascal de Clermont, creó, sobre las ruinas del Instituto de psicología aplicada, su Laboratorio de psicología de la cognición; fue Presidente de la Universidad de 1992 a 1997. Luego se convirtió en el rector de Bordeaux, y escribió entonces un importante informe titulado: « Proposiciones para un nuevo acercamiento de la evaluación de los enseñantes », que remitió a François Bayrou, ministro de Educación nacional. Supongo que ese informe tiene algo que ver con su nombramiento en julio de 2002 como director de Enseñanza superior. El ministro que lo nombró era Claude Allègre. El 21 de marzo último se convirtió en el presidente del consejo de la Agencia de evaluación de la investigación y de la enseñanza superior (AERES), puesto que debió dejar el 22 de mayo, en el momento en que fue nombrado delegado de François Fillon. Es sin ninguna duda el hombre de la evaluación en la Universidad francesa. Es a su sucesor en el Laboratorio de Clermont, el Pr Fayol, a quien eligió para supervisar los numerosos equipos de la AERES que durante todo el año van a hacer una evaluación experta de todos los clínicos y psicoanalistas universitarios. Es su triunfo.
Podemos preguntarnos cómo la Facultad de psicología de Clermont, donde enseñó Foucault, que él marcó con su enseñanza, pudo convertirse en un bastión del cognitivismo. Esto es lo que ocurrió.
Para secundarlo en Clermont, Foucault eligió a Mme Pariente. Esta se convirtió en la directora del Instituto de Psicología Aplicada. Era una clínica, y la hemos sostenido siempre, Simone y yo, una ex normalista, como su marido, el filósofo Jean-Claude Pariente, del cual usted conoce la reputación, y que vino aún a dar una conferencia en marzo último en la Asociación Cause freudienne, sobre la noción de nombre propio, que vamos a publicar.. Mme Pariente tendría mucho que decir sobre su combate en Clermont, su evicción, y la supresión del Instituto de Psicología Aplicada en provecho del Laboratorio de J.-M. Monteil.
René Haby, el primer ministro de Educación nacional con Giscard, promotor del « colegio único », fue rector de la Universidad de Clermont. Alice Saunier-Séité, que lo sucedió en la Universidad en 1978, rehizo el programa de las Facultades de psicología, y erradicó de Clermont la clínica en provecho del cognitivismo. Fue sorprendente en ese momento, tanto que Mme Pariente era giscardiana en política mientras que M. Monteil, era conocido por ser de tendencia PS. Tanto es así que la « Fac de psico » de Clermont se convirtió en lo que se convirtió.
Ahora es el Pr Fayol el que reina como amito absoluto sobre la psicología en Clermont. De Monteil a Fayol, en 30 años, no hay un solo profesor, un solo maestro de conferencia, un solo asistente, un solo encargado de curso que haya sido clínico. El desierto. Al punto que no hay DESS de psicopatología en Clermont, caso único según Jean-François Cottes.
Muy cordialmente.
Jean-Robert Rabanel
PJ : bajada de la computadora su carta al decano de la facultad de Letras de Clermont, con fecha 30 de marzo de 1992
DEPARTEMENTO DE UNIVERSIDAD DE PARIS VIII PSICOANÁLISIS
Al Sr Decano de la Facultad de Letras
de Clermont-Ferrand
Señor Decano y estimado colega
Me permito escribirle en relación con una « Sección clínica » en Clermont-Ferrand, que se refiere al departamento que yo dirijo en la Universidad de París VIII.
El Dr Jean-Robert Rabanel es conocido y apreciado desde hace años por mí mismo y por la mayor parte de los miembros del equipo doctoral « Psicoanálisis y campo freudiano » que animo en el Departamento. En particular, el Dr Rabanel fue invitado a colaborar en la « Sección clínica » de París, que hemos creado en el marco del servicio de formación permanente de la Universidad.
Numerosos psicoanalistas han querido a su vez crear tales « Secciones clínicas » en el extranjero. Es así que he aceptado dar los auspicios del Departamento a « Secciones » que se abrieron en Bruselas, Madrid, Roma y Barcelona. Estos establecimientos son administrados de manera autónoma por sus responsables locales, en general a través de las asociaciones sin fines de lucro. Por el contrario, los programas, los contenidos y los métodos de enseñanza se conciertan con nosotros.
Una « Sección clínica » se abrió el año pasado en Bordeaux, con gran éxito. El Dr Rabanel quiso crear una en Clermont, y yo le he dado mi apoyo.
Si le fuera posible a la Universidad de Clermont-Ferrand poner locales a disposición de este proyecto, yo desearía vivamente que lo hiciera. A mi juicio, un verdadero interés público se liga en efecto a la divulgación de una enseñanza metódica y racional del psicoanálisis: el deseo de « realizar su personalidad » permite abusos desvergonzados; no se puede suprimir ese deseo, que nutre el « desencanto » moderno; pero podemos orientarlo hacia una disciplina de verdad, que no es incompatible con una perspectiva científica, y que tiene su lugar en la Universidad: la disciplina analítica.
Multiplicar los « Departamentos universitarios de psicoanálisis » sería deseable; en su defecto la universidad, ayudando a las « Secciones clínicas » puede jugar un papel saludable.
Reciba Usted, Señor Decano y estimado colega, mi más alta consideración
Jacques-Alain Miller