Autisme : accueillir et accompagner plutôt que vaincre
Le 10 avril, plus de 150 participants – travailleurs de la santé mentale, juristes, politiques familles – étaient réunis dans la salle de conférence du Conseil général de l’Eure pour une manifestation consacrée à la clinique de l’autisme. M. Champredon, maire d’Evreux, M. Silighini, 1er vice président du Conseil général, et Président du Conseil de surveillance du CH de Navarre et deux députés de l’Eure, Messieurs Lefranc et Bruno ont ouvert cette conférence aux côtés de M. Killian, directeur du CH et de psychiatres du CH, le Dr Abekhzer et le Dr Pera. Cette manifestation est venue en réponse à la proposition de loi du député Fasquelle et au récent rapport des experts de la haute Autorité de santé concernant le traitement de l’autisme et des troubles envahissant de développement. Ceux-ci s’inscrivent dans une même dynamique qui consiste à écarter, voire à interdire les thérapies orientées par la psychanalyse pour réaffecter les moyens de la santé vers le médico-social réputé moins onéreux. Ces décisions reposent sur une lecture de l’autisme qui le réduit à un déficit neurologique dont la cause serait génétique, le traitement se ramenant dès lors au choix de la bonne molécule et à l’application de méthodes d’apprentissage standardisées visant à réduire le déficit. Les questions de l’enfant comme sujet, sa souffrance, les interrogations de ses proches n’ont plus droit au chapitre, et la spécificité de la psychiatrie n’a plus lieu d’être. A l’opposé, les praticiens qui reçoivent les enfants entrant dans le large spectre des « troubles autistiques » et qui travaillent avec les familles, relèvent que l’intérêt de tous ne réside pas dans la réduction à un mode unique de traitement mais dans le maintien de prises en charge multidisciplinaire qui s’orientent sur la singularité du sujet et prennent en compte la parole. Ces dernières semaines, une vaste campagne publicitaire se déploie autour du slogan « Vaincre l’autisme ». Avec la modestie de ceux qui se coltinent le réel de la souffrance psychique, les différents intervenants ont montré l’efficace de la devise qui centre leur travail « accueillir et accompagner l’autisme », au un par un. Ils ont fait valoir le sérieux du travail à plusieurs, où interviennent des disciplines médicales, sociales, éducatives. Cet après midi a reçu le soutien de Madame Judith Miler, Présidente du champ freudien. Cette conférence-débat a mis en lumière la contradiction qui s’accentue entre d’une part ces témoignages cliniques avec les résultats reconnus par des instances évaluatrices et d’autre part la violence des propos tenus contre les pratiques cliniques inspirées de la psychanalyse. Outre que ces propos révèlent un déficit de démocratie, ils masquent le vrai problème, celui de la pénurie de moyens mis en œuvre pour recevoir les sujets, enfants, adolescents, adultes qui ne sont pas dans la norme. Valérie Pera Guillot.