sur Hillary Clinton et son élection à la présidence des États-Unis. Surprise
planétaire. Une surprise prenait la place d’un suspense dont on pouvait encore
jouir la veille au soir tard, en fermant les yeux. L’effet de choc venait du
fait que ni les experts, pundits politologues et autres « spécialistes » du
commentaire, ni les algorithmes sophistiqués des marchands de sondages n’avaient
pu prévoir l’événement. Au réveil, une touche de réel nous faisait signe, le
plus souvent sous la forme d’une incrédulité ou d’une déception, affects tout
aussi réels que la mauvaise humeur dont Lacan faisait état dans « Télévision »…
finir, juste avant le moment de conclure, en musique, ce temps fort de notre
institution, sur un air de David Bowie. Non seulement elles eurent lieu, mais
elles furent encore marquées par l’intensité. Le discours analytique s’y
démontra, en acte, sous les projecteurs de l’objet regard. Et lux fit!
joyeuse Stimmung de ces Journées. Son art de bien dire l’invention nous
entraîna sur ses pas, en filature, oserais-je dire. Il y aurait sans doute
beaucoup à dire sur son travail fait de moments créatifs qui répondent aux
ruptures marquant sa vie. Ces ruptures furent traumatiques dans la mesure où
elles marquèrent – on le suppose en tout cas – la fin du regard qu’un être aimé
posait sur elle. Pour chacun (et qui plus est, pour chacune), dans ces circonstances, la rupture ouvre alors un trou dans les
semblants, ce troufût-il plus ou moins patent et plus ou moins bordé…
Sophie Calle (1) expose pour la première fois à Montréal en 2015 sous le titre
: « La dernière image ». Il s’agit d’une série de témoignages d’aveugles qui, pour la
plupart, ont perdu la vue subitement. L’artiste leur a demandé de décrire
leur dernière image. Les textes sont accompagnés de photos de chacune des
personnes aveugles, comme une recréation photographique, un regard de l’artiste
sur ces souvenirs.
Dans l’un des témoignages, Aveugle au revolver, le jeune homme a perdu la vue à
la suite d’un acte de violence. La dernière image est la scène de la
violence même, le traumatisme, une mauvaise rencontre avec le réel où
chaque détail est retenu…
L’Interdit de et par
Gérard Wajcman
L’Interdit de Gérard Wajcman est réédité. Dans une
courte présentation aux lecteurs de Lacan Quotidien, l’auteur en situe
l’actualité. Ceci est un roman. Il est composé entièrement, ou presque, de
notes de bas de page. Il raconte l’histoire d’un type en voyage qui s’arrête de
parler. Enfin, c’est ce qui semble. Chacun peut se raconter l’histoire un peu à
sa façon. Le silence et l’absence sont le sujet de ce livre. L’idée était de
faire que le sujet de ce livre et l’objet de ce livre se recouvrent. Faire d’un
manque un objet, positif, matériel, visible. Construire un livre autour d’une
absence incarnée. Rendre ainsi l’absence palpable, donner à lire, à entendre ou
à voir la présence d’une absence. Vu sous cet angle, L’interdit n’est pas
exactement un livre composé de notes, comme il y a, par exemple, des romans par
lettres, c’est un roman formé par, pour et autour d’une absence, d’un manque à
dire, à écrire et à voir. D’un impossible à dire, à écrire et à voir…