Un après-midi à Brive Michèle Astier
Dans la Lettre mensuelle de novembre dernier, Maryse Roy, Daniel Roy et Philippe Lacadée disent ce que le titre des prochaines journées du RI3 doit à la « Préface à l’édition anglaise du Séminaire XI » de Lacan, publiée dans les Autres écrits et sur lequel Jacques-Alain Miller est revenu à plusieurs reprises dans son cours. Lacan se montre là préoccupé par les cas d’urgence. À la lecture de ce texte, nous sommes frappés par la tension, concernant la cure, entre historisation et cas d’urgence. Si la première renvoie à la structure de discours qu’introduit l’hystérie avec l’invention de l’inconscient freudien, le second relève d’un réel particulier. La psychanalyse traite d’abord l’urgence subjective par une historisation/hystérisation – d’où ce terme que forge Lacan d’hystorisation –, avec l’association libre dans le transfert, qui permet une articulation signifiante de ce qui a fait irruption et qui ouvre la perspective d’un nouage entre savoir et vérité. Mais cette voie bute sur une difficulté, et l’urgence fait retour au point où le registre de la vérité trouve sa limite. L’articulation ne suffit pas à traiter le réel et ses effets de jouissance, les signifiants de l’histoire ne permettent plus de border l’impossible devant lequel se trouve le sujet. Comment dès lors traiter ces surgissements qui se présentent sous les espèces de l’urgence ? Le RI3 aborde le problème non à partir de la cure, mais de ce qui se rencontre dans l’accompagnement de patients en institution, rencontre avec ce « trop » que nous indique l’argument des journées. La réunion de travail qui s’est déroulée dans la délégation de Brive-Tulle de l’ACF-Massif-Central le 31 octobre dernier a donné un premier aperçu de la diversité des cas et des réponses possibles. Voilà qui est extrêmement précieux en ce temps qui est le nôtre et qui pousse à l’urgence, comme l’a introduit Jean-Pierre Rouillon qui animait l’après-midi, avec ces commandements de toujours plus, toujours plus vite, et qui pousse des sujets sur le versant de la pulsion de mort. Il convient également, insistait-il, de se repérer entre urgence sociale et urgence subjective. Les cas présentés, issus pour une part d’une institution d’orientation lacanienne, le CTR de Nonette, et pour l’autre part d’un classique service de consultation, ont fait état d’interventions qui n’en passent pas par l’histoire du sujet et de sa famille, mais qui s’appuient strictement sur la structure. Les quatre interventions ont été largement discutées. Elles ont fait entendre par quels détours un accompagnement orienté peut aboutir à une séparation d’avec l’objet voix, présent de toute évidence dans ce gadget qu’est le téléphone portable (Zoubida Hammoudi), ou qui anime, derrière l’image, un conflit entre deux pensionnaires (Hervé Damase). Dans un service de consultation, le passage obligé par un rendez-vous téléphonique introduit une première temporalité, puis c’est en passant par un certain maniement du signifiant au niveau de la lettre (Gabriel Chantelauze) et un désir décidé (Nadine Farge) qu’un écart sera obtenu. Autant de situations où il a été possible de faire passer la précipitation à une autre temporalité (mise en suspens, anticipation, lecture après-coup). Se faire partenaire du sujet a eu dans chaque cas effet de civilisation. Ces quelques notes ne prétendent pas rendre compte de la richesse de cette séance de travail qui donne un avant-goût de ce que sera le rendez-vous de Bordeaux en janvier prochain. Puissent-elles susciter le désir d’en entendre et d’en lire davantage !
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